J'ai revu récemment ce film d'espionnage qui était resté vivace dans mon souvenir. Sidney Pollack a toujours déclaré que c'était le genre de film "popcorn sans aucune signification, le genre de bêtise qu'on tourne sans se poser de questions". Cependant, sous l'étiquette du divertissement, il montre un aperçu de la CIA pas tellement flatteur, avec la paranoïa et la suspicion qui règnent dans la société, même si on se doutait un peu des agissements pas toujours propres de la célèbre agence. Dès le début en effet, le spectateur est précipité dans un univers inquiétant où n'importe qui peut devenir une cible et où les différentes cellules de la CIA risquent de s'affronter. A partir d'un roman moyen de James Grady qu'il a condensé avec ses scénaristes, Pollack attaque plus frontalement la hiérarchie de l'agence à une époque où cet organisme était fortement remis en question suite à des assassinats politiques à l'étranger et des écoutes téléphoniques illégales ; on n'est pas loin du Watergate. Il dénonce aussi l'inhumanité d'un monde livré à la violence, à la toute puissance des organisations policières où le seul contre-pouvoir encore efficace semble être la presse. Finalement, le film est certes divertissant, c'est une course à la survie, mais je l'ai trouvé assez compliqué pour démêler ces fractions inquiétantes de bureaucrates dont la soi-disant neutralité ne suffit pas à cacher les ambitions et les facultés de tuer. Robert Redford est parfait dans son rôle de sans grade perdu et effaré devant la cruauté et l'indifférence des services, de même que Max Von Sydow campe un de ces exécuteurs froids qui tuent de façon mécanique et normale comme on allume son micro-ondes...