Monsieur Hulot est un homme simple, célibataire endurci, profondément humain, aimant la vie et la nature. Les beaux jours arrivés, il décide de partir vers la mer afin de passer des vacances bien méritées sur le sable. Alors que l'exode des vacanciers s'organise, Monsieur Hulot, évitant le tapage des gares et les trains bondés, part, au volant de sa bonne vieille guimbarde pétaradante et brinquebalante, rejoindre l'hôtel de la Plage sur la côte Atlantique. Arrivé à destination, Monsieur Hulot, personnage anticonformiste, aura bien du mal à s'intégrer au reste de la clientèle de l'établissement. Malgré tout, inconscient des problèmes qu'il provoque innocemment dans son entourage, notre célèbre vacancier arrivera tout de même à passer un agréable séjour rempli de diverses occupations et aventures. Il est vrai qu'il n'est pas insensible au charme de Martine, la jeune occupante d'une villa voisine du monotone l'hôtel de la Plage.
Alors là, vive la poésie, l'observation, l'humour et la nostalgie! Qui, et vu mon âge je suis bien placé pour en témoigner, n'a pas connu cette folie des départs en train avec les mouchoirs qui s'agitaient, les haut-parleurs aux discours inaudibles, les wagons surchargés de voyageurs, les valises traînant dans les couloirs, puis enfin, le vieil autocar poussif qui, les bagages sur le toit, vous amenait, épuisés par le voyage, à destination? Qui n'a pas connu durant ces années cinquante, ces hôtels avec leur cloche pour vous appeler à heures fixes pour les repas, la plage se vidant alors instantanément, ces salles à manger silencieuses où chacun s'observe, se regarde en chien de faïence avant de lier connaissance, juste le temps du séjour. Et puis il y avait cette clientèle variée, des gens snobs, des rigolards, des sérieux ou des dragueurs. Les jours se passaient ainsi, allongés sur la plage, face à la mer avec pour tout luxe, une glace à la vanille ou un morceau de guimauve. Puis, après la corvée des cartes postales à la famille et aux amis, c'était la dernière soirée de fête à l'hôtel, puis les "au revoir","et si vous passez par chez nous, venez nous voir!". Bilan des vacances: elles avaient été monotones!!! sauf pour Monsieur Hulot...
Nous sommes en 1953 et voici le deuxième long métrage de Jacques Tati. Il s'agit pour moi de l'un des monuments du cinéma français. Ce pur chef-d'oeuvre d'observation, de poésie et de drôlerie dépeint sans complaisance tous les travers, les absurdités mais aussi les qualités de chacun de nous. C'est l'ensemble d' une société qui est passé au crible, du beauf au bourgeois. Tati ridiculise les intelllos qui ont bien du mal à nous en convaincre, il rit des petites gens maniérés, aux habitudes ridicules, qui veulent se donner une importance qu'ils n'ont pas. Pendant ce temps, Monsieur Hulot, en toute simplicité et indiscipline, profite de cette bêtise humaine qui s'étale autour de lui, se moquant de l'hypocrisie ambiante. Des scènes d'une drôlerie inoubliable parsèment cette oeuvre : le pneu transformé en couronne mortuaire, la partie de tennis et celle de ping-pong, le fiasco du bal masqué, le feu d'artifice et bien d'autres encore. De plus l'atmosphère de cet hôtel triste à mourir, tenu par un personnel sinistre, nous fournit un contraste formidable avec la désinvolture de Jacques Tati. Vraiment rien ne manque. La fameuse musique " Quel temps fait-il à Paris ? ", tourne en boucle dans ce film et dans notre mémoire tel un vieux 78 tours, ce qui ajoute encore au charme suranné de ce séjour en bord de mer des années cinquante.
Impossible de se lasser de cette oeuvre margistrale, véritable féérie d'humour et d'observation.. Au détour d'une image, comme par magie, on découvre le nouveau détail que le magicien de la pellicule, Jacques Tati, avait glissé là comme par hasard. Voici l'oeuvre d'un poète et d'un visionnaire de notre société.