Je ne savais quasiment rien de Leto avant de voir le film, juste que ça parlait de rock à Leningrad dans les années 80 et c'était une claque monumentale. C'est sans doute le film le plus solaire que j'ai vu (du moins au début) depuis une éternité, peut-être l'est-il plus encore que Mektoub my love ou Mustang. On a là un film qui épouse totalement son sujet, la mise en scène transpire le rock'n roll et c'est juste enivrant. C'est d'une vivacité inouïe, ça a un rythme fou, dès que tu sens que ça va se poser, que ça pourrait rentrer dans une routine, le film se renouvelle, invente quelque chose de nouveau de visuellement fou pour continuer à t'en mettre plein les yeux.


Bon déjà le contexte est passionnant, le début des années 80 à Leningrad, rien que l'idée de voir comment le rock était représenté c'est une idée géniale. Parce que ouais, on faisait du rock à Leningrad, rien que ça c'est juste fou. On les voit assis bien sagement sur leurs sièges alors qu'ils ne rêvent que de sauter et hurler, mais ils sont surveiller, ils ne peuvent rien faire. Le génie du film c'est de réussir à concilier les scènes où l'on montre comment ça marchait à l'époque pour faire de la musique, il fallait que les paroles soient approuvées (le truc impensable), comment ils s'inspiraient des américains, comment ils se sentaient inférieurs aux ricains... comment ils étaient obligés de traduire, difficilement, les paroles pour comprendre de quoi parlent les textes...


L'ambiance est fascinante et puis il faut voir comment c'est mis en scène, ça a une liberté folle ! Rien que la première scène où les fille s'infiltrent pour écouter le concert, avec un long plan où elles essayent de ne pas se faire repérer... et puis il y a surtout cette séquence à la plage, la musique est omniprésente et juste sublime, le réalisateur arrive à capter les instants de vérité, on voit les visages, les sourires, les regards et on sent immédiatement qu'il y a un truc entre Viktor et Natasha. D'ailleurs est-il possible qu'il n'y a ait rien avec Natasha ? Elle est interprétée par Irina Starshenbaum qui peut sans le moindre problème prétendre à être, dans ce film, l'une des plus belle, si ce n'est la plus belle, femme au monde. Elle a ce charme fou lorsqu'elle regarde les hommes qu'elle aime (dans le film) qui feraient craquer n'importe quel homme. Et puis elle a un petit côté Anna Karina avec sa frange. C'est le genre d'actrice qui porte un film, on ne voit qu'elle lorsqu'elle est à l'écran, elle rayonne et inonde de tendresse le film.


Bref, le réalisateur arrive à capter ces moments, à immerger le spectateur dans ce monde, à le projeter sur la plage avec ces musiciens et à apprécier une baignade dans la Baltique...


Et tout le génie est là, lorsque l'on passe à autre chose, lorsque l'on sent que tout à coup ça va devenir plus sérieux, plus triste, le film se réinvente, ils sont dans un train, un type les emmerde car ils sont l’ennemi car soumis aux idéologies américaines et là, le film explose, on passe en comédie musicale rock débridée et juste dingue visuellement. On sent toute la liberté, par la mise en scène, que permet le rock ou que représente le rock.


Le réalisateur se permet même jusqu'à des apostrophes, brise le quatrième mur, avec un personnage récurent qui vient annoncer que ce l'on vient de voir n'est jamais arrivé... et franchement sans ces entorses à la réalité, sans ces escapades, difficile d'imaginer le film qui transpire la liberté justement parce qu'on s'autorise tout, même l'impensable.


Les scènes virtuoses du genre se répètent dans le film sans pour autant qu'il n'y ait de redite.


Mais il ne faut surtout pas oublier la tendresse folle qui se dégage de ce ménage à trois (pour ainsi dire). C'est réellement beau et touchant de voir les personnages se tourner autour, se chercher, s'aimer et puis il y a ce plan séquence final qui est juste déchirant... Le fait de s'attarder comme ça sur le visage de la fille émue aux larmes, c'est juste parfait. Cependant je dirais que le sommet émotionnel a peut-être été atteint lors d'une analepse. En effet, le réalisateur coupe volontairement une séquence entre Viktor et Natasha pour mieux la replacer plus tard comme un éclairage de ce qui se passe entre eux et surtout comme point d'orgue émotionnel. C'est grandiose.


Il n'y a aucun déchet dans le film, tout est bon, tout est délicieux, c'est d'une telle beauté et d'une telle tendresse que c'est un régal pour les yeux et les oreilles de chaque instant. C'est clairement le genre de film qui peut faire l'unanimité.

Moizi
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le 24 déc. 2018

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