Mélanie Laurent signe avec Libre son film le plus romantique et sensible, plaisant et attachant.
Bruno Sulak, rebelle, poète, marginal, braqueur au grand cœur, est le personnage emblématique du monde de cette cinéaste à la trajectoire déroutante et affranchie, que l’on aurait pu voir se contenter de figurer sur la short liste des actrices frenchies happées par Hollywood (l’épisode Tarantino entre autres) et qui s’avère incontestablement tenace et effrontée dans sa volonté de mettre en scène et d’inscrire sa tonalité d’artiste libre et sans entraves. Une sorte de maverick à la française.
Cette épopée-cavale libertaire et amoureuse est inspirée de l’histoire vraie de Bruno Sulak, qui commence sa carrière de braqueur anarchiste et poète en s’attaquant à des grands magasins pour marquer ensuite l’histoire du grand banditisme en passant à la classe supérieure des bijouteries huppées.
Dans les deux cas, ce qui intéresse Mélanie Laurent, ce n’est pas tant la véracité des événements (avec lesquels l’histoire prend des libertés et laisse voir des invraisemblances naïves) que l’esprit franc, enfantin et profondément romanesque de son beau personnage de voyou vertueux (joué par un Lucas Bravo doux, beau et bon).
La chanson de Reggiani « Enivrez-vous » que le film nous fait redécouvrir est à l’image de sa mise en scène. Un brin décalée, mélancolico-rêveuse et désireuse d’ensorcellements, de tapages et de défis où la vie prendrait son panache.
« Il faut vous enivrer sans trêve. De vin, de poésie ou de vertu. À votre guise. »
On pourrait dire que Libre manque de forme, de souffle et d’ampleur s’il ne bifurquait vers cette proximité tendre et cette lascive utopie d’un braqueur voulant braquer et risquer pour le pur plaisir de se délivrer d’un conformisme rétrécissant les vies, d’un braqueur amoureux du geste de voler comme s’il s’agissait de la même chose que de briser la pesanteur ou de vivre sans entraves.
Manifestement, c’est l’histoire d’amour et d’amitiés sincères entre Sulak et son complice yougoslave, entre Sulak et le flic qui le traque (Ivan Attal très attachant) qui importent à la réalisatrice. Et c’est ce qui vaut au film sa discrète aura, son plaisir sincère, acidulé et enfantin d’y voir évoluer des acteurs aimés et aimant jouer.