Motion capture.
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Ian Curtis, réduit à une silhouette noire, immobile et maladroite, auréolée de l’éclat brûlant d’un projecteur, c’était lui : Anton Corbijn. Photographe, entre autres, de David Bowie, Joy Division, U2, Clint Eastwood et Miles David, l’homme est devenu réalisateur en 2007 avec la réalisation de Control, biopic tout en contraste saisissant de la courte existence du chanteur sus-cité. Visiblement sensible aux histoires d’étoiles filantes, Corbijn récidive en 2015 en réalisant Life, un film évoquant la rencontre entre James Dean et Dennis Stock, photographe de l’agence Magnum dont déboucheront quelques clichés célèbres du rebel without a cause ; quelques heures, quelques jours, pour saisir l’âme d’une figure crépusculaire de la jeunesse d’autrefois.
James Dean, donc. Dans le Los Angeles de 1955, James Dean n’est pas encore le fantasme de toute une génération : l’homme est un drôle d’animal, tout en gaucherie juvénile, velléitaire, maladroit, « acteur presque par hasard » bien décidé à obtenir le rôle-titre de La Fureur de Vivre de Nicholas Ray. Un chiot séduisant que deux personnes vont essayer de dresser, dans leurs propres intérêts : Dennis Stock qui, percevant chez lui une force évocatrice rare, entend révéler la sensibilité de l’acteur au monde pour assoir sa propre réputation, et Jack L. Warner, puissant magnat du cinéma bien décidé à faire de l’encombrant génie une véritable poule aux œufs d’or. Le film devient alors remarquable d’inconfort : peut-on apprécier ce Dennis Stock, père absent, mauvais payeur, que l’arrogance étouffe presque ? Peut-on apprécier ce Jack L. Warner qui, lors d’une entrevue avec James Dean, lâche un avertissement laconique : if you’re not a good boy, I’m gonna fuck you. Until it hurts really bad? Pour le premier, Dean est un sujet à étudier, pour l’autre, une matière à exploiter. Pourtant, l’acteur, peu à peu, en vient à se confier à ce photographe qui n’entend pas le quitter d’une semelle : il parle surtout de sa mère, décédée alors qu’il n’était qu’un enfant, qu’il présente comme l’élément déclencheur de son désir d’être acteur, sans que l’on parvienne à savoir si Dennis s’intéresse à l’histoire ou se contente de le prétendre pour obtenir le cliché le plus représentatif de la sensibilité de James Dean. C’est malheureusement là que le bât blesse : l’interprétation de Bane DeHaan, tout en justesse mesurée, échoue pourtant à impliquer émotionnellement le spectateur qui, des complaintes sèches de Robert Pattinson aux avertissements sentencieux de Ben Kingsley, devient le témoin légèrement inutile d’une fuite en avant bien mise en scène et dont la photographie rappelle l’enfant-bâtard d’un mariage entre Walter Salles et les frères Joel et Ethan Coen. Life n’est pourtant pas un naufrage : en évoquant en filigrane l’Amérique des années 50 et ses contradictions, il parvient à saisir l’attention des spectateurs. Malheureusement, ils ratent ses deux publics potentiels : les admirateurs de James Dean, qui n’apprendront rien, et ceux qui ne le connaissent pas et auront bien du mal à suivre ces presque deux heures de tergiversations presque silencieuses et sincères, mais prétentieuses et stériles. Reste quelques répliques bien senties : Qu’allez-vous faire tout ce talent ? Continuer à l’ignorer, probablement. »
Créée
le 7 mars 2016
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