On sent bien que le réalisateur a une démarche honnête, qu'il veut faire les choses correctement sans être là pour glorifier Marlon, ni pour le descendre (ce qui est effectivement facile à faire dans les deux cas). Mais l'angle de vue adopté est beaucoup trop pathétique et convenu.
Vendu comme une auto-analyse de sa vie, racontée exclusivement par l'acteur à travers des enregistrements personnels, le discours est inexorablement manipulé par le réalisateur et monteur qui façonne son histoire avec des bribes de textes qui, mises bout à bout, forment un monologue plus ou moins cohérent. En l'espace de quelques secondes, on passe de la voix de l'homme âgé à celle d'un homme de quarante ans, les phrases sorties hors de leur contexte sont mélangées contre leur gré. Même si de temps en temps l'intégralité d'un propos ou d'une idée exprimés par Marlon reste intouchée.
Seulement l'histoire ainsi racontée, dans laquelle l'acteur légendaire analyse l'origine de ses névroses, reste banalement la même que celles racontées dans les livres et les autres documentaires consacrés à Brando. On raconte sa vie, mais sa vie on l'a connait. Dans les bonus le réalisateur se justifie en disant "on n'essaie pas de réinventer la roue, mais d'adopter un point de vue différent". Certes, ces enregistrements inédits peuvent à eux-seuls justifier la valeur de ce documentaire, mais finalement la facilité avec laquelle on les utilise rend l'exercice un peu vide, voire amer.
Les malheurs de son enfance, sa mère alcoolique, son père oppresseur, la relation fondatrice avec sa gouvernante, ses enfants, ses femmes, son combat politique, le dernier tango, les drames qui ont anéanti ses dernières années, tout ça on connait. Pas besoin d'entendre Marlon en parler. Déjà parce que, putain, c'est accablant et puis parce ça verse dans le mélodrame.
Avec autant de matière, on aurait pu faire un documentaire exceptionnel. Ses réflexions philosophiques, sa vue du monde, ses pensées sur les coulisses des tournages (Apocalypse Now putain), sur le monde du cinéma ou que sais-je encore. Quand on voit la liste des sujets abordés par Marlon dans ces enregistrements (dans les bonus) ! C'est un crime d'en avoir utilisé que des morceaux disparates !
Mais non, on se contente de parler de meurtre et de drame et de faire pleurer les grands-mères. Tout ça aurait beaucoup énervé Marlon. C'est tout ce que je sais.
“Je trouve vomitive toute publicité personnelle.” Marlon Brando