Il faut botter le soldat braillard

La cinquantaine allègrement consommée au moment de tourner ce Little Big Soldier, Jackie Chan semble échapper à l'emprise du temps. L'enfoiré n'a absolument rien perdu de son agilité, de sa vélocité ni de son talent comique, et continue de se donner à fond autant dans les combats que dans les cascades.

Mais ce qui frappe avant tout ici, c'est le degré de maîtrise atteint par Chan dans l'art mal aimé du divertissement. S'il laisse ici la réalisation à un néophyte, Ding Sheng, il n'en demeure pas moins la tête pensante du film, assurant aussi bien l'écriture du scénario, la production et la réalisation des scènes d'action.

Et y a pas dire, peu de scénaristes hollywoodiens grand public seraient capables de trousser une telle petite pépite trouvant la parfaite osmose entre équilibre rythmique, rebondissements à foison, enjeux multiples mais pas alambiqués, dialogues savoureux et action dynamique, le tout sans prendre les spectateurs pour des neuneus.

Plus que par ses scènes de combat, pourtant très réussies et inventives, c'est par la qualité de son duo de protagonistes que Little Big Soldier brille avant tout. Sur une trame classique de buddy movie, catégorie "ennemis jurés qui vont devenir amis", Chan trouve sans cesse le ton juste et prend tout le temps nécessaire pour faire évoluer la relation entre le soldat des Liang et le général des Wei de façon crédible et touchante. Les deux acolytes se rendent coup pour coup, et l'alchimie entre les deux acteurs se sent dès le début du film.

Dommage que la fin, au demeurant assez couillue et franchement poignante, laisse un arrière-goût d'inachevé, avec son narrateur nous rappelant qu'en gros tous les royaumes de Chine se sont fait asservir par les Qin, sur un ton qui nous suggère de prendre ça pour un happy end. De quoi légèrement égratigner le message pacifiste développé tout au long du film, quand on connait les atrocités commises au nom de l'unification du pays. Mais pas vraiment de quoi gâcher le plaisir pris tout au long de cette comédie ficelée avec métier, et plus important encore, avec amour du métier.