"Logan...what did you do ?" Chronique d'une semi-déception.

(ATTENTION: Cette critique contient des SPOIL en masse.)

A chaque fois je me prends à espérer que cette fois c'est la bonne. Que ce film de super-héros sera celui qui répondra à mes espoirs d'une ambiance viscérale et sans compromis. Qu'il traitera ses personnages de manière humaine avant tout, avec une certaine finesse.
Et je ne vais pas mentir, "Logan" est ce qui se rapproche le plus de cet idéal. L'honnêteté de James Mangold, son admiration pour la mythologie super-héroïque, transpirent dans chacun de ses plans.
Si j'avais noté "Logan" en tant que "film de super-héros", je lui aurai sans doute attribué un beau 8/10, tant il se situe dans le haut du panier de ce que Disney, la Fox ou la Warner nous proposent en ce moment. Sauf que je voulais l'appréhender comme film, tout court.
Mais c'était aussi de sa faute. On a pas idée de se payer du Johnny Cash en trailer, de dévoiler des images post-apocalyptiques d'une rare beauté, de teaser de belles relations humaines, si on assure pas à fond derrière.

Autant commencer avec le positif tout de suite. Toute la première partie se déroulant à la frontière entre Etats-Unis et Mexique est incroyable. J'étais littéralement collé à mon siège.
Hugh Jackman et Patrick Stewart sont au sommet de leur art. Les rapports totalement décomplexés entre les deux hommes usés physiquement et psychologiquement laissent transparaître le respect et l'affection qu'ils entretiennent l'un pour l'autre.
Tantôt touchante, tantôt drôle, la vie de ce Logan ivrogne et chauffeur de voitures de luxe est empreinte d'une mélancolie de chaque instant.
Mangold maîtrise son décor et l'ambiance "western impitoyable" du film est bien plus réussie que celle de son très plat "3h10 pour Yuma". Les combats sont...."Waouh". J'ai du mal à être plus précis, quitte à passer pour un Michel Drucker en puissance.
Au niveau du contexte, les indices sur le pourquoi de la disparition des mutants sont donnés au compte goutte, ce qui nous aide à considérer cet épisode comme un "one shot", sans volonté de le relier au reste de la saga.
Et c'est ensuite que ça se gâte...

La partie road trip/course poursuite est agréable jusqu'à l'épisode de la ferme qui retombe dans les travers non seulement de la franchise, mais des films Marvel en général. La famille gentille et accueillante face à un Logan bourru mais protecteur qui se fait finalement exterminer par les méchants (coucou "X-men Origins: Wolverine). La mort de Charles Xavier est d'ailleurs expédiée assez rapidement, ce qui minimise son impact émotionnel.
La suite est plus intéressante. La relation que développent Logan et X-23 sort des sentiers battus, avec de réelles confrontations verbales, presque bestiales, entre les deux mutants.
Je vais maintenant parler du dernier réel bon point du film avant de me lâcher sur le négatif: La référence méta aux comics X-Men. Ce qui aurait pu se limiter à du simple fan service dan un film comme "Deadpool" sert ici une idée bien plus profonde et intéressante, notamment traitée dans le "Mr Holmes" de Bill Condon (Cf: ma critique sur ce film) : La différence entre notre histoire, notre représentation de nous-même, et la manière dont les autres nous racontent.
Ici, Logan se retrouve face à une gamine (certes, badass et griffue, mais une gamine quand même) bercée par les récits des exploits des X-Men que le protagoniste principal sait enjolivés et éloignés de ce que lui et ses amis ont pu réellement vivre. Une réalité plus amère.

Le film a vraiment commencé à me décevoir dans son dernier acte. Un complot scientifico-gouvernemental (comme c'est original, tiens !) pour détruire les mutants naturels et créer des mutants à leur service...mouais, c'est pas comme si ça avait été vu et revu dans les autres films de la franchise. Entre le "vaccin anti-mutant', les expériences de Stryker et sa création d'une équipe de mercenaires mutants, les recherches pour faire disparaître le facteur régénérant de Wolverine... ON A COMPRIS.
Alors qu'il avait tout pour être un film indépendant de la saga, avec une ambiance et des thèmes qui lui sont propres, "Logan" est rattrapé dans son dernier tiers par une volonté de tout re-contextualiser (le fils de Stryker qui arrive comme un cheveu sur la soupe, le plan tout moisi pour exterminer les mutants...). Et je ne parle même pas du clone méchant de Wolverine. Quitte à faire dans l'introspection, y avait quand même plus fin pour monter un personnage se "battre contre lui-même".
Ajoutez à cela quelques débilités scénaristiques comme des enfants mutants qui s'enfuient en courant au lieu d'utiliser leurs pouvoirs pour dérouiller les mecs qui les poursuivent, et vous obtenez une fin décevante.
Heureusement, le "retournement de croix" (ceux qui ont vu le film comprendront) final, à la charge émotionnelle assez dingue, arrive à nous faire passer outre une scène de mort assez convenue et très américaine.

Alors vous pouvez vous poser la question: "Mais espèce de sombre connard (je vous encourage pas non plus, hein), qu'est ce que t'aurais voulu voir dans ce film ?"
J'aurais voulu un film de super-héros qui s'assume totalement comme indépendant du reste de son univers. J'aurais voulu que les frissons et l'extase ressentis durant la première partie ne me quittent jamais. J'aurais voulu une ambiance à "La route" (ou même "Le livre d'Eli" pour rester dans les canons hollywoodiens), avec un vrai chemin initiatique pour notre "Old Man Logan". J'aurais voulu ne plus jamais entendre parler d'expériences et de tout le blabla pseudo-scientifique propre au genre.
Mais ce film n'existe pas, et plus j'y repense, plus je me dis que je suis dur avec "Logan". La hype y est pour beaucoup.

Allez, 6,5/10 pour ce que le film a réussi à me faire ressentir dans sa première moitié.