Lola, une femme allemande par Alligator
La relation entre Schukert (un Mario Adorf qui fait immanquablement penser à Günter Lamprecht) et Lola (sublime Barbara Sukowa) ne peut pas ne pas faire lien avec la série Berlin Alexanderplatz tournée un peu auparavant. Les relations fassbinderiennes sont vraiment très mal fagottées. Entendons par là que les personnages aiment à tisser des liens de domination et de duperie plutôt glauques, du moins pas épanouissants pour deux deuschmarks. Evidemment que la vie est compliquée. Les personnages de Fassbinder heurtés, cassés, déstructurés font ce qu'ils peuvent avec ce qu'ils ont, leur passé, leur désirs et ambitions, leur rêves et cauchermars, en un mot, ils sont puissamment vrais. De ce fait, le film touche, avec violence comme toujours (mais encore, peut-être moins que par ailleurs? ma filmographie fassbinderienne est encore très courte), il empoigne et serre le coeur, tendre et violent à la fois.
J'ai adoré Berlin Alexanderplatz, j'ai bien aimé Le droit du plus fort ou Les larmes de Petra Von Kant, pas trop emballé par L'amour est plus fort que la mort, et cette Lola prend le chemin du podium en première place avec la série.
Pour couronner le tout, la photographie, sorte de polychrome énervé, m'a enchanté, rendant une sorte d'hommage au cinéma de Sirk et plus probablement à son directeur photo Russel Metty, auteur de ces sublimes déchaînements d'expression de couleurs. On retrouve dans la maison de Von Bohm, les branches de fleurs qu'Hudson coupe dans Tout ce que le ciel permet.
Les acteurs parlons-en. Armin Mueller-Stahl, Barbara Sukowa, Mario Dorf sont d'une justesse et d'une richesse chromatiques eux aussi qui ne laissent pas de m'esbaudir. La mise en scène des comédiens est comme toujours avec Fassbinder le metteur en scène de théâtre d'une finesse et d'une beauté à faire pleurer. Je commence sérieusement à me faire du soucis : je me fassbinderise de plus en plus.
Berlin Alexanderplatz a été une révélation, un baptême.
Lola est une confirmation.
Vivement l'eucharistie!