S'il y a quelque chose d'évident à la sortie d'une séance de Longlegs, c'est que le film va forcément diviser. Car les cartésiens qui voulaient à tout prix y retrouver une filiation avec le formidable Le Silence des Agneaux en seront pour leurs frais. C'est que Osgood Perkins emprunte un autre chemin.
Car le réalisme froid de naguère sera poussé en arrière plan, au profit d'un long cauchemar noir et d'un malaise dérangeant. Ainsi que d'un étrange rapport au temps et aux souvenirs.
On vous a sans doute déjà rebattu les oreilles de cette fameuse scène d'introduction, noire comme la neige, inquiétante, introduisant un étrange personnage à la voix de crécelle et au teint pâle, dont on ne fait que deviner le visage dans ses rictus lorsque soudain, la gêne se transforme en effroi.
On sent que Perkins vise avant tout à créer une atmosphère délétère pour mieux noyer son enquête et ses personnages. Il y réussira à plusieurs reprises, le bougre, via une mise en scène ultra soignée axée sur le trouble de la symétrie, des mouvements de caméra lents et quelques déflagrations de violence graphique prenant par surprise.
Une atmosphère relayée par l'enquêtrice Lee Harker, dont l'isolement social et les failles éclaboussent l'écran, comme une petite soeur de la Shailene Woodley de Misanthrope.
Si la traque en elle-même demeure classique, elle s'enfonce de manière irrémédiable dans un étrange onirisme des plus sinistres, faisant peu à peu comprendre que quelque chose d'insaisissable est tapi dans l'ombre de la décrépitude, et que le serial killer recherché n'est finalement qu'un véhicule d'une menace plus grande et implacable.
Allant jusqu'à contaminer un retour en enfance, explorée par flashs successifs jouant d'abord sur le pouvoir de suggestion des images, comme si l'on regardait des photos polaroïd, ou un film de famille en train de lentement se détraquer. Si un tel procédé était déjà au coeur de films comme Sinister ou encore Black Phone, il achève cependant d'enfoncer le spectateur dans le malaise du thriller tendance horrifique.
Une telle atmosphère et un tel aspect tourné vers l'esthétique aideront sans doute une partie du public à accepter le virage clairement surnaturel pris par le dernier tiers de l'oeuvre, digne de l'esprit des épisodes loner de la série X-Files, illustrant la lente et irrémédiable contamination du mal. Une fois digéré cette composante essentielle du récit, il est difficile d'en tenir rigueur à Lonlegs qui, une heure quarante durant, nous aura emmené avec lui dans un voyage à travers ce que l'humanité recèle de plus sombre et sans retour.
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