Après Chainsaw Man, c'est au tour d'une autre œuvre du mangaka Tatsuki Fujimoto d'être portée à l'écran. Look Back, adaptation du one-shot homonyme paru en 2021, n'est cette fois-ci pas réalisée par le studio MAPPA, comme c'était le cas de Chainsaw Man, mais par le tout récent Studio Durian, studio d'animation créé par Kiyotaka Oshiyama.
L'histoire
L'histoire est celle de deux jeunes collégiennes, Fujino et Kyomoto qui, du fait de leur personnalité très différente, aspirent au même rêve : celui de devenir mangaka. Mais le chemin de la création est semé d'embûches, et si Fujino se révèle gonflée d'estime de soi, ce n'est pas le cas de Kyomoto, qui souffre de phobie sociale... Telles deux faces d'une même pièce, leurs vies se croisent et s'éloignent, mais l'amour de l'art, lui, est toujours là.
Le Studio Durian
Pour un jeune studio indépendant, Studio Durian réalise déjà l'un des métrages phares de l'animation japonaise, tant grâce au parti pris artistique choisi que par la qualité du résultat final. La présence à la réalisation du célèbre Kiyotaka Oshiyama explique en grande partie la qualité de ce rendu, puisqu'ayant chapeauté certains projets d'envergure dans le paysage de l'animation japonaise, tel que Flip Flappers, Denno Coil, Devilman Crybaby ou encore Chainsaw Man.
Là où le studio MAPPA réalisait, au travers de son adaptation de Chainsaw Man, une création estampillée de la patte de leur équipe créatrice, le studio Durian choisit d'effectuer une adaptation fidèle à la case près et ce, jusque dans le trait du mangaka, qui est ici reproduit à l'identique. Ici, pas de CGI ou de 3D, pas d'effets de postproduction, mais bien de l'animation traditionnelle et ce, jusque dans les séquences dynamiques, fruit d'un processus assez inédit dans l'animation japonaise, puisque le réalisateur et l'animateur Toshiyuki Inoue ont à eux seuls réalisé 70% des animations.
Mais ce qui pourrait passer pour un manque d'inspiration créatif se révèle être la façon la plus réussie d'exposer toutes les qualités de ce qui fait la "patte Fujimoto", souvent réduite à l'usage de références cinéma et à son trait brut et brouillon.
Car l'autre élément de son art, souvent occulté mais brillamment retranscrit dans Look Back, c'est bel et bien sa manière de décomposer le mouvement au travers de longues successions de cases fixes et contemplatives, mettant en valeur les sentiments de ses protagonistes.
Il n'y a qu'à voir certains éléments de Look Back pour s'en convaincre : de la beauté poétique d'une course à en perdre haleine à l'harmonie cruelle du passage des saisons, tout est sujet à la contemplation et à l'exposition des sentiments dans ce métrage, et montre par la même la poésie dont peut faire preuve l'auteur, habitué au shonen.
Accompagnés par une bande originale vibrante d'émotion, composée par Haruka Nakamura, chaque séquence de ce moyen métrage donne lieu à de splendides moments de vie, aussi dramatique et fugace puissent-ils être.
Mais en parallèle de cette beauté graphique de tous les instants se déroule un propos incisif et réaliste sur la réalité du métier de mangaka, vu au travers du parcours de nos deux collégiennes aspirant à en vivre. Il y a d'abord les difficultés liées à l'apprentissage nécessaire et intensif du dessin chaque jour, au risque de se démotiver du jour au lendemain si l'on découvre que d'autres font mieux que nous.
Mais il y a aussi le cruel manque de reconnaissance du travail harassant de mangaka ainsi que de leurs assistants, ou encore la fatigue accumulée à réaliser une longue série. Mais Look Back est avant tout une lettre d'amour à la création, qui montre que même face à un chemin semé d'embûches et de doutes, l'artiste aime à créer, pour la simple récompense de voir au moins une personne apprécier son œuvre.
Pour la beauté de son animation comme pour son histoire touchante, Look Back est un film d'animation vibrant d'une sincérité émotionnelle absolue, maîtrisée de bout en bout dans sa réalisation, qui mérite toute votre attention.