"Lord of War" est un film américain sorti en 2005 et réalisé par Andrew Niccol. De lui, tout le monde connait bien sûr le fameux "Bienvenue à Gattaca", film d'anticipation à la mise en scène bluffante, ou même le plus récent "Time Out". Il faut savoir aussi qu'il est également scénariste et on lui doit notamment le script du fabuleux "The Truman Show" avec Jim Carrey. Et on lui doit aussi ce film, unique en son genre, "Lord of War".
On estime à environ 550 millions le nombre d'armes à feu actuellement en circulation. Autrement dit il y a un homme sur douze qui est armé sur cette planète. La seule question c'est [il tire une bouffée de fumée de son cigare, puis l'expire] … comment armer les onze autres ?
Dès le début du film, le ton est donné. On sera placés pendant deux heures du point de vue d'un homme, fils d'immigrés russes vivant à Brooklyn. Il s'appelle Yuri Orlov et ce personnage est incarné avec brio par Nicolas Cage, dans un de ses plus grands rôles.
Orlov est à la base un jeune homme perdu. Il vit dans un quartier pauvre et ne sait pas quoi faire de sa vie. Mais un jour, il a une révélation. Il se découvre une passion soudaine pour la vente d'armes et comme il le dira par la suite, c'est un business dans lequel il est "bon". Il commence petit, en revendant des armes dans son quartier, puis son affaire se développe et il devient une très grosse pointure du métier.
On suit ainsi cet homme de ses débuts dans les années 1980 jusqu'à une certaine journée en 2001 (non je ne parle pas du 11 septembre). Son parcours sera semé d'embuches, il devra jouer sur tous les fronts, être à l'affût en permanence, se méfier de tout le monde. Sa femme, son frère, Interpol, la menace peut venir de partout.
"Lord of War" est-il un énième film pro-américain ? A cette question je réponds directement et sans transition : NON ! Si vous pensez cela ou si c'est ce que vous avez compris en voyant le film alors c'est que vous n'avez strictement rien compris.
Bien au contraire, "Lord of War" est un film qui montre toute l'hypocrisie du système en place. Il y a des guerres partout dans le monde, les représentants des soi-disant États civilisés (d'un certain point de vue ce n'est bien évidemment pas faux) font de beaux discours pour dire que la guerre c'est mal, etc, etc ... Mais comme il nous l'est si bien rappelé dans le film, les cinq plus gros exportateurs d'armes dans le monde ne sont pas des revendeurs comme Yuri Orlov, ce sont les cinq membres permanents du Conseil de sécurité de l'ONU (les États-Unis, le Royaume-Uni, la France, la Russie et la Chine).
Cela donne à réfléchir, n'est-ce pas ?
Que pouvons-nous faire face à cela ? J'ai envie de dire, rien du tout ...
Le film le monde d'ailleurs très bien, notamment lorsque le frère de Yuri, Vitali (Jared Leto), tente en vain d'empêcher un massacre. Il se fait tout simplement tuer. Rien ne pourra empêcher cela. C'est dans l'ordre des choses. Yuri nous le rappelle d'ailleurs très souvent dans le film lorsqu'il dit "ce n'est pas notre guerre" ou quand il dit "si ce n'est pas moi qui le fais, quelqu'un d'autre prendra ma place".
Je pense que le film fonctionne, c'est-à-dire qu'il nous amène à réfléchir sur le monde actuel et sur le contrôle des armes à feu notamment (ou le non-contrôle plutôt) car on est placés du côté du "méchant" de l'histoire. Si nous avions été placés du côté des autorités, donc du côté de Jack Valentine (Ethan Hawke), le constat aurait été totalement différent et on n'aurait pas alors eu une dénonciation si forte du trafic d'armes.
Mais qu'elle est l'autre raison qui fait qu'on accroche à ce film ? Réponse : la réalisation.
Andrew Niccol signe une mise en scène impeccable. Ses plans de caméra sont tout simplement excellents. Mais au-delà de ça, c'est cette virtuosité et ce cynisme à toute épreuve dans la façon de filmer qui rend le film passionnant.
C'est tout un style, c'est tout un art.
Sa direction d'acteurs est impeccable. Nicolas Cage n'aura jamais été aussi classe, aussi ancré dans un rôle que dans ce film. Et pourtant c'est un fan de l'acteur qui parle.
"Lord of War" est un film maitrisé. Maitrisé techniquement déjà, mais aussi et surtout maitrisé dans la façon d'exposer le propos sur le trafic d'armes. Les monologues de Nicolas Cage frappent toujours juste, ce n'est pas sans nous rappeler certains films de Martin Scorsese.
Je terminerais sur cette réplique de Nicolas Cage :
On dit: "Le mal l'emporte quand les hommes de bien se croisent les bras" ce qu'on devrait dire c'est, le mal l'emporte.