Voilà dix ans, je suis jeune, sensible et admiratrice d'Ethan hawke.
Comme quoi, les choses n'ont pas beaucoup changé...
Il est évident que dans ce film Ethan a un tout petit rôle (même si essentiel à l'intrigue) et qu'on ne le voit pas des masses mais quand je vous aurais avoué que j'ai acheté un film juste pour une apparition de 2 minutes à peine, je crois que vous aurez, chers lecteurs, compris l'ampleur de mon problème.
Andrew Niccol s'attaque de front au trafic des armes à feu à travers le personnage de Yuri Orlov.
Produit uniquement par des fonds européens, français principalement, Hollywood n'a pas eu son mot à dire sur le contenu du projet.
Le pessimisme, le cynisme, voire le nihilisme de l'oeuvre ainsi aboutie ne laisse aucun doute sur le fait que le choses en auraient été autrement si l'industrie du cinéma américaine s'était penchée sur le projet. Vain, vénal, calculateur et pourri, à aucun moment il n'est possible pour le spectateur d'éprouver la moindre sympathie pour cet immigré inspiré du personnage Viktor Bout emprisonné depuis 2012.
Niccol évacue toute forme d'empathie ou d'émotion pour coller au plus près de ce coeur de pierre égocentrique. Il donne à humer le purrin existentiel de cette raclure abominable tout au long du film.
L'extraordinaire scène d'ouverture défonce tout !
Mémorable s'il en est, le décor, jonché de balles, est apocalyptique. De ce parterre de douilles la caméra bouge, avance et se dirige vers la voix off qui commente le film. Là, on aperçoit le Seigneur de Guerre.
La caméra se fait subjective, la narration peut commencer.
"On estime à environ 550 millions le nombre d'armes à feu actuellement en circulation. Autrement dit il y a un homme sur douze qui est armé sur cette planète. La seule question c'est … comment armer les onze autres ?"
De là, on suit la trajectoire d'une balle meurtrière de sa fabrication à la pénétration dans les chairs de sa cible, un jeune enfant passé par là par hasard.
Paradoxalement, cette horreur est accompagnée d'une musique d'une légèreté déconcertante formant un contraste frôlant l'absurde.
Retour en arrière, dans les années 90. Le jeune Yuri, immigré d'europe de l'est, assiste à une énième fusillade dans le quartier de Little Odessa.
De sa prise de décision de "changer" de vie, son parcours, ses rencontres, on le voit se sentir devenir intouchable.
Qui est le plus fautif ?
Lui, simple freelance ou les gouvernements qui ont le monopole légal du commerce de la mort ?
La question est posée, la réponse est donnée.
Sachant que les armes représentent la première exportation de notre cher pays des droits de l'homme, le spectateur est dans le coeur du sujet pour ne plus le quitter.
Montrer un système capable de se dénoncer lui-même : le signe d'un cynisme suprême ?