Los Olvidados par LeJezza
En quittant en apparence le surréalisme, le génie espagnole s'installe au Mexique pour une oeuvre sociale d'une noirceur intense. Film social? Pas vraiment, Bunuel se pose en témoin dès le début, et pas en accusateur ni en moralisateur, et ce très explicitement. Los Olivadados est ainsi une chronique poignante de la misère infantile mexicaine.
Bunuel multiplie les pistes, nous plonge dans la pitié, avant de redonner de l'espoir pour mieux nous briser dans un final terrible et magnifique à la fois. Le film nous hante très longtemps, mais au-delà de ça, ce sont tous ces enfants qui l'accompagnent dans cette hantise, ce sentiment d'impuissance qu'il procure face à cette misère qui rattrape sans cesse les enfants qui cherchent à la fuir. Ce film d'un pessimisme profond ne laisse finalement pas de place à l'espoir, même face à ce directeur bienveillant qui dit si justement "si au lieu d'enfermer les enfants, on pouvait enfermer la misère", mais dont le propos résonne si tristement 5 minutes après lorsque cette misère et cette délinquance rattrape ironiquement le jeune garçon qui voulait enfin faire quelque chose de bien. Los Olvidados a beau être une oeuvre grave, elle est surtout un chef d'oeuvre de cinéma dans lequel Bunuel abandonne ses procédés habituels pour se concentrer sur la mise en résonance d'une misère omniprésente.