Los Olvidados
7.8
Los Olvidados

Film de Luis Buñuel (1950)

Contemporain du néoréalisme italien, le film de Luis Bunuel n'a rien à envier aux drames sociaux de Rossellini et autre Vittorio de Sica. Cette proximité artistique, cette familiarité, n'empêchent pas Bunuel d'apposer sa griffe sur ce film qui, lorsqu'il délaisse un moment le réalisme brut, introduit des scènes oniriques troublantes ou d'étranges fulgurances qui rappellent la culture surréaliste du cinéaste.

"Los Olvidados" (les oubliés) ont pour cadre un faubourg de Mexico, véritable cité-bidonville, et pour héros, ou plutôt sujets d'étude, les enfants de la rue. Ils sont quelques uns, plus ou moins livrés à eux-mêmes, à errer dans des rues sinistres, sur des terrains vagues sur lesquels les édifices en construction semblent en réalité des ruines. Parmi ces jeunes garçons, deux font l'objet, de la part de Bunuel, d'une attention plus particulière: Jaibo l'orphelin, adolescent violent et, déjà, délinquant irrécupérable; et puis, plus jeune, Pedro dont la fréquentation de Jaibo pourrait l'entrainer sur la mauvaise pente. Leur sort, à tous les deux, semble déjà réglé.


La direction d'acteurs est aussi juste que le propos, qui est celui d'un humaniste éclairé, évoquant modestement le renoncement familial et éducatif, la pauvreté et l'exploitation des enfants; des enfants perdus et bientôt oubliés...

Des personnages "bunueliens" traversent le film, tels ce bourgeois qui tente d'acheter les faveurs de Pedro ou, surtout, cet aveugle intransigeant, brutal, en qui on est tenté de voir une incarnation divine, évidemment maltraitée par le cinéaste. On ne s'étonne guère, en tout cas, que soient absents de ce drame social la religion et les curés...

Enfin, considérant le dernier plan du film, sombre, cruel et tragique, on a envie de paraphraser Jean-Luc Godard à propos du regard d'Harriet Anderson dans un film de Bergman: c'est le plan le plus triste de l'Histoire du cinéma.

inspecteurmorvandieu
9

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Luis Bunuel

Créée

le 14 déc. 2024

Critique lue 12 fois

Critique lue 12 fois

D'autres avis sur Los Olvidados

Los Olvidados
LeJezza
10

Critique de Los Olvidados par LeJezza

En quittant en apparence le surréalisme, le génie espagnole s'installe au Mexique pour une oeuvre sociale d'une noirceur intense. Film social? Pas vraiment, Bunuel se pose en témoin dès le début, et...

le 11 oct. 2012

14 j'aime

1

Los Olvidados
Morrinson
7

"Implacable comme la marche silencieuse de la lave." Octavio Paz

Los Olvidados ("Les Réprouvés", passe encore, mais alors "Pitié pour eux", quelle horreur... Pitié pour nous, oui !) rappelle dans une certaine mesure la misère et l'extrême dureté du microcosme que...

le 25 mars 2017

8 j'aime

2

Los Olvidados
AstridChe
9

Les enfants errants de Mexico, mais pas seulement...

Los Olvidados c'est l'histoire ou les histoires des gamins des rues de la banlieue de Mexico. On découvre leur quotidien violent, malsain et où la tendresse et l'éducation est inexistante. Tout au...

le 16 janv. 2014

6 j'aime

1

Du même critique

Calmos
inspecteurmorvandieu
2

Critique de Calmos par inspecteurmorvandieu

Le film de Blier résonne comme une réaction au féminisme des années 70. Excessif et provocant, Blier renverse les rôles et ce sont les hommes qui réclament leurs droits, qui se refusent d'être la...

le 21 oct. 2024

2 j'aime

Marie-Chantal contre le docteur Kha
inspecteurmorvandieu
3

Critique de Marie-Chantal contre le docteur Kha par inspecteurmorvandieu

Claude Chabrol tourne une parodie d'espionnage avec la désinvolture qu'il met habituellement à la réalisation de ses films de commande. De fait, les aventures de Marie-Chantal, quoiqu'on y trouve...

le 20 oct. 2024

2 j'aime

Nana
inspecteurmorvandieu
3

Critique de Nana par inspecteurmorvandieu

Nana se confond avec Martine Carol dans ce film bien éloigné des préoccupations historico-sociales, "naturalistes", de Zola. On ne trouvera dans le film de Christian-Jaque aucun réalisme, social ou...

le 20 oct. 2024

2 j'aime

1