"I am nervous"
Toutes les limites de la caméra embarquée affleurent dans ce documentaire qui semble souffrir des mêmes limitations qui ont eu raison de son sujet, L'homme qui tua Don Quichotte de Terry Gilliam...
le 8 mai 2016
4 j'aime
8
Pour la sphère cinéphile, il ne fait aucun doute que Lost in La Mancha fait partie de ces documentaires précieux et uniques destinés à emporter sur une île déserte. Il est difficile d'offrir une critique précise du documentaire, aussi ce qui suit tient plus compte d'un compte-rendu de l'époque de mon premier visionnage de ce film de Keith Fulton et Louis Pepe. J'essayerai cependant d'en dévoiler le moins possible sur ce présent long-métrage.
Pour donner une recontextualisation, Terry Gilliam est un réalisateur d'origine (à la base) américaine ayant renié sa nationalité vivant et officiant depuis les années 1970 en Angleterre, nous pouvons le considérer aujourd'hui comme un artiste anglais. Il a commencé comme illustrateur/animateur pour la fameuse troupe des Monthy Python avant de se lancer dans l'acting et surtout la réalisation de long-métrage de fiction. Il ne fait aucun doute que le cinéaste offre un univers et des thématiques qui lui sont propres ainsi qu'un imaginaire immédiatement reconnaissable. C'est à partir de son sixième long-métrage, Les Aventures du Baron de Munchausen (1988), que le réalisateur débutera une réputation de cauchemars des studios qui lui colle aujourd'hui encore à la peau. Entre les multiples dépassements de budgets et les problèmes de production, le film aura eu du mal à voir le jour, mais s'avérera finalement un ovni proche du chef d'oeuvre. Gilliam impose un style et une imagerie perfectionniste alors jamais vue. Chaque tournage sera pour lui par la suite le résultat d'un travail long, problématique et douloureux, mais aboutissant toujours à un objet fascinant.
C'est durant l'année 2000 que Terry Gilliam se lance alors corps et âme dans la réalisation du projet censé être son chef d'oeuvre : L'Homme qui tua Don Quichotte. Il est à l'époque question d'une oeuvre fantasmagorique. Le duo Keith Fulton/Louis Pepe était censé tourner le making of du film de Gilliam, cependant le tournage tournant vite à la catastrophe, il fut décidé d'en faire un documentaire complet nous retraçant les éléments et problèmes ayant mené à l'annulation pure et simple du tournage. Cela résulte de multiples problèmes rencontrés, entre les problèmes de financement, de météo, de prises de son ou de blessures d'acteurs...le projet reste aujourd'hui légendaire dans le monde du cinéma.
Ce documentaire est un objet exceptionnel du fait qu'il expose tout ce qui peut mal se passer lors du tournage d'un film. Pour tout cinéphile ou personne voulant travailler dans le cinéma, il s'agit d'un "must have". Le film est non seulement fascinant par ce qu'il propose en terme général, mais également du fait qu'il s'intéresse au personnage de Gilliam. Le cinéaste apparaît débordé, au bord de l'effondrement pourtant il continue à croire en son oeuvre et à se battre. Finalement, il s'agit presque d'une leçon sur la persévérance quand on sait aujourd'hui que le tournage fut relancé plusieurs fois dans les 18 années qui ont suivi pour finalement aboutir au long-métrage sorti en 2018. Gilliam est un peu la quintessence de l'image de l'artiste combattant pour ses rêves (d'autant que c'est à l'image des personnages et concepts qu'il exploite). Le film nous offre un portrait de l'homme ne pouvant que fasciner pour peu que l'on s'intéresse au cinéma ou tout simplement au cinéaste.
Mais pinaillons, Lost in La Mancha comporte quelques soucis mineurs malgré la réussite indéniable qu'il représente. Le documentaire étant à la base prévu comme un making of, plusieurs façons de présenter le sujet semblent à quelques rares reprises moins maîtrisées et certains passages un peu ajoutés "pour faire joli". Cependant, ce n'est pas vraiment la faute du film en lui-même sachant qu'il n'était pas censé devenir l'objet auquel nous sommes présentés. J'aurai peut-être moins de retenue concernant un public snobinard s'étant prétendu, suite au visionnage de Lost in La Mancha, adorateur des écrits de Miguel de Cervantes sans en avoir lu une seule ligne ou du travail de Gilliam sans en avoir vu un seul film. Cependant, derrière cela, il est intéressant que nous constations l'influence du présent documentaire et à quel point il a en fait profondément marqué un public cinéphile ou non.
C'est bien derrière ces petits éléments de critiques (qui ne sont en fait pas des éléments de reproches destinés au film) que nous pouvons voir la puissance de Lost in La Mancha. Sa sincérité sur les réalités du monde du cinéma aura ébranlé les esprits d'artistes dans la veine de Gilliam, mais aussi celui d'un public (cultivé ou non) ayant espéré voir un jour L'Homme qui tue Don Quichotte au cinéma.
Le résultat final nous fut offert en juin 2018 pour un film bien différent de celui prévu à l'origine, mais offrant son lot d'éléments fascinant à nouveau. Vous retrouverez la critique de celui-ci en vous dirigeant vers ce lien (je vous encourage à continuer la lecture, celle-ci faisant suite au présent texte) : https://www.senscritique.com/film/L_Homme_qui_tua_Don_Quichotte/critique/140819793
Pour anecdote, j'ai eu l'occasion de rencontrer à deux reprises Terry Gilliam, aussi j'ai appris qu'un "Lost in La Mancha 2" serait en production par les mêmes réalisateurs sous le titre He Dreams of Giants. En attendant, je vous encourage à découvrir ce documentaire que vous soyez cinéphile ou non, il s'agit d'un projet fascinant pour une figure artistique qui l'est tout autant.
Gloire à Terry Gilliam !
Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Ma collection de DVD/Blu-Ray (films uniquement) et Les films donnant la sensation de vivre l'un des plus grands moments de l'histoire du Cinéma
Créée
le 8 avr. 2020
Critique lue 175 fois
1 j'aime
D'autres avis sur Lost in La Mancha
Toutes les limites de la caméra embarquée affleurent dans ce documentaire qui semble souffrir des mêmes limitations qui ont eu raison de son sujet, L'homme qui tua Don Quichotte de Terry Gilliam...
le 8 mai 2016
4 j'aime
8
Terry Gilliam a réussi à transformer un fiasco monumental en un film plutot intéressant. on découvre les coulisses de la réalisation d'un film, et comment un génie peut être frustré par un système...
Par
le 10 août 2011
3 j'aime
1
... la race de sa grand-mère ! On ne présente plus Don Quichotte de la Manche, le héros de Cervantès pourfendeur de moulins, ni Terry Gilliam, le Monty Python réalisateur des incontournables Sacré...
Par
le 25 avr. 2018
2 j'aime
Du même critique
Critique rapide de "À couteaux tirés" : J'ai conscience que cet avis sera impopulaire. Je ne comptais pas écrire d'avis sur ce film néanmoins je ne vois que très peu de critiques négatives donc je...
le 4 déc. 2019
71 j'aime
11
Précisons avant toute chose que cette critique sera 100% spoilers vous voilà dés à présent prévenu.Doctor Sleep réalisé par Mike Flanagan est un projet pouvant offrir autant de fascination que de...
le 24 mai 2022
48 j'aime
1
J'ai attendu ce film des années et des années durant. Le livre de Stephen King est le livre m'ayant le plus marqué dans ma vie et est mon oeuvre littéraire préférée. Cet ouvrage offre des thématiques...
le 7 sept. 2017
48 j'aime
12