S'il est une chose particulièrement forte à propos de Lost River, c'est bien son sens de l'esthétisme en dépit de toute linéarité dans le récit. En effet, si l'on ne comprend jamais tout à fait où veut en venir Ryan Gosling (dont c'est le premier film), on ne peut s'empêcher d'être envoûté par ce flot d'images lancinantes, belles, baroques et macabres où la violence et le drame semblent envahir chaque volute de ces maisons que le réalisateur contemple longuement en train de brûler.
Deux histoires se croisent dans une ville crépusculaire (sans doute Détroit). Celle d'un fils, qui découvre avec son amie une ville engloutie sous un lac et source d'une étrange malédiction. Et celle d'une mère dont le manque de moyen aménera à travailler pour un club étrange où une violence fictive devient un objet de spectacle grotesque.
C'est un pays désolé que filme Ryan Gosling, une terre désertée et sombre dont les habitants ne sont plus que des fantômes ne désirant qu'une chose : s'enfuir. En celà, Lost River devient une puissante représentation visuelle de la crise économique. Mais c'est sans doute sur sa partie fictionnelle que le film fascine le plus : quel est ce club exactement ? Qui est ce banquier inquiétant qui semble en être le patron ? Bones (le fils) parviendra-t-il à se défaire de ce jeune criminel qui cisaille les lèvres de ces victimes ?
On pourra sans doute rapprocher Lost River du style du groupe de musique Dead Man's Bones auquel appartient Ryan Gosling où sa fixation sur les fantômes et les squelettes trouve ici un écho évident. S'il possède certainement encore les tics inhérents à toute première oeuvre (bande son un peu trop présente, certaines scènes trop symboliques, styles empruntés à d'autres), on félicitera en tout cas le jeune comédien qui a su nous embarquer dans un voyage macabre et captivant au terme duquel on ne sort pas tout à fait indemne.
Vivement le prochain !