Soudain le vide
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Les cassettes défilent. On y voit des familles moldaves heureuses, des enfants ouvrir des colis remplis à ras bord : de la nourriture, un téléphone, parfois des jouets. Certains films affichent la date : 2003, plus de dix ans après la chute du mur. À travers la caméra, les enfants s’adressent à leurs mères, parties récolter de l’argent en Europe de l’Ouest.
Love is not an Orange est avant tout un film basé sur cette absence. On aimerait dire qu’elle est pesante, mais ce n’est pas ce qui transparaît dans les archives : hormis quelques crises de larmes ici et là, la vie continue au pays. Et puis les enfants ont l’air si heureux d’ouvrir leurs cadeaux ! Pour nous rappeler ce hors champ, la réalisatrice nous fait écouter les complaintes des mères, dont la solitude contraste avec la braillerie familiale. Pendant la majeure partie du film, le spectateur est mis dans la position passive de ces mères, qui regardent des moments de vie auxquelles elles ne participent pas. Dès lors, on ressent la douleur de voir la famille feuilleter un catalogue et exprimer leurs souhaits comme s’ils s’adressaient au Père Noël.
Durant ces soixante-dix minutes, le spectateur est assailli de sentiments agités. L’amertume de ne détecter aucune souffrance dans les visages, de voir la joie des enfants lorsqu’ils ouvrent leurs cadeaux. La nostalgie face à ces scènes de la vie familiale. La frustration de ne jamais entendre personne exprimer ses sentiments, de voir cette famille exemplaire et sans contrariété. Le rejet du banal. Le dégoût de voir le peuple subir à la fois l’instabilité socialiste et l’exploitation capitaliste. Otilia Babara rend un hommage pudique mais vibrant à toutes ces souffrances intériorisées.
Créée
le 10 mai 2023
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