Ca commence comme n'importe quelle histoire d'amour. Deux êtres se croisent, se découvrent, s'apprivoisent. Classique. Dans les coulisses d'un hôtel balnéaire, Clemens, masseur maladivement maladroit, et Lara, cuistot constamment cuitée, forment pourtant un duo amoureux comme on en a rarement croisé. Deux extrêmes qui s'attirent à feu doux, se toisent patiemment avant de s'entrechoquer violemment.
Si ce couple fonctionne si bien à l'écran, c'est qu'il apporte la réponse la plus concise et précise qu'il soit possible d'apporter à la question "c'est quoi l'amour" : "bah c'est compliqué". Et cela alors qu'à aucun moment on n'entend un personnage dans le film prononcer "je t'aime" ou "ich liebe dich". Chez Jakob Lass, l'amour c'est plus que des mots, ce sont des étincelles, des épreuves, des intentions, des jeux, des coups, et même une mission de sauvetage.
Débordant de spontanéité, Love Steaks repose en grande partie sur l'alchimie miraculeuse entre les deux acteurs, sur leur capacité à nous entraîner dans leur sillage, que ce soit pour partager leurs gamineries ou leurs séances d'exorcisme hawaïen. Mais il fallait aussi un réalisateur assez sûr de lui pour créer cette atmosphère particulière, pour magnifier la réalité froide (humiliations au travail, tendances auto-destructrices de Lara) en y instillant ce qu'il faut de fantaisie, d'absurde et d'humour vache pour enfanter cet instant en suspension, comme si Peter Pan avait trouvé un job d'été dans un bled paumé face à la Baltique.