Adaptation plutôt réussie, Lovers relève le défi de garder la qualité narrative du roman de Roth tout en l´enrichissant d´une image soignée et d´un regard artistique pertinent. Néanmoins, les tourments intérieurs de cet homme mûr redécouvrant l'amour se révèlent somme toute assez convenus, voire stéréotypés, n'étonnant donc guère et nous laissant parfois de marbre.
Soulignons tout d’abord l’excellente conduite du récit qui grâce à ses divers personnages principaux accompagnant David (Ben Kingsley) nous mènent à travers des itinéraires différents autour d´une variation sentimentale sur la fidélité et l´amour. Le piège à éviter était surtout celui de se concentrer exclusivement sur le couple David / Consuelo (qu´incarne Penelope Cruz) mais Coixet l´évite et parvient ainsi à ne pas lasser le spectateur ni étouffer l'intrigue dans une relation unique. La pluralité des points de vue et des expériences apporte ainsi des nuances et ouvre des portes donnant une bonne respiration au sujet.
Par ailleurs, la beauté plastique de la photographie, avec d'excellents clairs-obscurs, principalement des corps, soutenue par une Pénélope Cruz habituée à poser, s'harmonise avec l'éthique des personnages, intellectuels se mouvant parmi l'élite artistique. La musique, elle, si elle nous apparaît souvent justifiée, se révèle parfois incohérente lorsqu'elle ne suit pas le sentiment des personnages – on pense à l'insistance sur les Gymnopédies de Satie, thème éminemment mélancolique, alors que leur relation devient ardente et passionnelle.
Mais s'il fallait reconnaître le grand défaut à nos yeux de Lovers, il nous faudrait parler de l'impression de vacuité qui s'en dégage. En effet, malgré de rares et courts discours théoriques et les noms de Barthes, Bresson ou Camus notés au tableau ou sur les livres de la studieuse Consuelo, le tout semble assez superficiel et centré principalement sur l'aspect matériel. De même, les dialogues, trop hantés par le silence, ne mènent nulle part et sont souvent assez banals. Coixet avait-elle l'intention de souligner la vanité de l'Homme qui confronté à sa finitude (sans vouloir dévoiler la fin) veut s'approcher de l'éternel alors qu'il ne poursuit que le vent? Certainement, même si cela n'est pas si évident à première vue.