Les grossièretés d'un néophyte scientifique

Luc Besson revient avec Lucy, énième film de sa carrière dans lequel il réitère avec ses concepts les plus chers. En effet, filles héroïnes, armes à feu, poursuites, bastons... Autant le dire de suite, c'est du pur Besson. Donc, la marche à suivre habituelle : que les détracteurs crient à nouveau au scandale, que les fans crient à nouveau au miracle.

S'il cartonne bien aux Etats-Unis, j'admets ne toujours pas arriver à comprendre pourquoi tant de haine envers lui dans notre hexagone. Certes, sa filmographie est irrégulière mais nous ne pouvons tout de même pas renier certains, à mes yeux, largement au dessus du lot. Le Cinquième Élément, Léon, Nikita, Le Grand Bleu... Allez quoi ! Ils sont loin, très loin d'être des navets et il faut l'admettre ! Même si ses films post-2000 sont le signe d'un réel déclin dans sa carrière, il est important de savoir que Lucy est la preuve d'un certain retour aux sources du réalisateur.

Avec un sujet de science fiction plutôt alléchant quoique déjà étudié (je pense entre autres à Limitless), Besson a de quoi raviver la flamme qui s'était éteinte depuis maintenant quelques années. Mieux que ça, il s'offre le culot de livrer sa propre réflexion sur le développement et l'évolution de la vie sur notre planète. S'il n'y a pas une once d'ambition là-dedans, je ne comprendrais jamais le monde alors. Reste après de savoir le représenter à l'écran. On connait bien Besson après tout. S'il brille dans un domaine, c'est bien celui de savoir filmer des poursuites en voiture, des fusillades, des moments de bravoure. Le film en est truffé et se veut d'être divertissant au maximum aux détriments d'un fond creux et fort éparpillé. Là est la différence. C'est clair, certaines séquences envoient du lourd. L'introduction ravit les yeux et les tympans, la transformation de Lucy fait plaisir, les travellings numériques sur l'intérieur de l'héroïne exposent largement un réalisateur qui sait avancer avec son temps et adopter les technicités adéquates. Reste seulement à ne pas trop s'éloigner du fond, qui a tendance à être survolé dans son ensemble, excessivement compliqué à compresser en une heure trente. Cela sent malheureusement l'empressement et le remplissage, pour un travail fini bâclé et peu crédible. La course poursuite en voiture en dit gros, inutile et à la limite du ridicule.

Les acteurs restent dans l'ensemble totalement inégaux. Scarlett Johansson n'a, en soi, pas grand chose à faire puisqu'à un moment, son intelligence est telle qu'elle ne ressent plus les émotions. La beauté fait le reste, quoi. Choi Min-sik est un réel atout pour le film même si son personnage reste classique. C'est Oh Dae-soo, quoi ! Je ne sais pas comment Besson a fait, mais il l'a fait et ce n'est pas un hasard ! Morgan Freeman, je n'en dis pas plus. Mon positionnement reste identique à mon avis sur Transcendance. Son allure physique et l'aura qu'il dégage semblent bien plus importantes que l'utilité et le but de son personnage. Et Amr Waked, inutile. A mes yeux, il est un autre gros point faible du casting. Il ne dégage aucun charisme et son personnage n'est là que pour boucher les trous.

Lucy n'est donc pas une réussite indéniable. Un film de science fiction aux rebondissements efficaces et aux questionnements parfois pertinents mais auquel il en dégage une fébrilité certaine de ce fond qui ne mérite pas grand respect, signe d'un réalisateur qui a vu un peu trop grand ou qui s'est contenter de lorgner bêtement ses aînés. Besson reste tout de même un réalisateur qui a le culot de faire ce qu'il a envie, d'amener les gens qu'il veut et de gagner sa vie. Il arrive même à deviner ce que serait une être humain qui utilise 100 % de son cerveau alors que lui-même n'en utilise que 10. S'il n'y a pas de fantaisie là-dedans... Alors pourquoi tant de haine ? J'avoue moi-même avoir éprouvé un vrai plaisir de gosse devant la scène finale (fort ressemblante au final de Contact), même si elle ne veut pas dire grand chose... Avec le recul, je me rends compte malheureusement qu'il n'y a as grand chose à sauver de ce Lucy, et que l'optimisme qui m'habitait durant ce film m'a peut-être fait fermer les yeux sur toute la médiocrité que rechigne le dernier travail de Besson.

Créée

le 18 août 2014

Critique lue 685 fois

17 j'aime

6 commentaires

langpier

Écrit par

Critique lue 685 fois

17
6

D'autres avis sur Lucy

Lucy
Gothic
2

Tebé or not tebé

Nuit. Tisane terminée. Film terminé. Gothic ôte son casque à cornes pour s'essuyer la joue tant il pleure d’admiration. Nomé(nale) quant à elle s'empresse de fuir pour cacher ses larmes de...

le 7 déc. 2014

276 j'aime

53

Lucy
Before-Sunrise
5

Oui-Oui apprend sa SVT

Luc Besson entre gentiment dans l’adolescence. A vue de nez, il a 13 ans. Ses cours de Science de la Vie et de la Terre l’intéressent beaucoup. Il y a quelques temps, il s’est mis à faire des...

le 8 août 2014

264 j'aime

90

Lucy
Citizen-Ced
1

Halucynant

Lucy est un film qui mérite d'être défendu. Parfaitement. Parce que mélanger The Tree of Life, Samsara, 2001 l'odyssée de l'espace et Taxi, c'est d'une ambition qui frôle l'inconscience. Lucy mérite...

le 23 oct. 2014

227 j'aime

37

Du même critique

Black Panther
langpier
6

Je suis ? Je suis ? Euh... Bagheera ?

Le Marvel Cinematic Universe s'est empli d'une sacrée flopée de films depuis si peu d'années. Avec un rythme de deux ou trois sorties par an, la franchise ne fait pas dans la dentelle et parvient...

le 16 févr. 2018

62 j'aime

4

Christine
langpier
10

Les abjections de l'adolescence

Dans leur domaine, Stephen King et John Carpenter s'équivalent. Tous deux maîtres de l'horreur, mais dans leur univers, ils sont deux grandes figures à la renommée internationale, deux emblèmes d'un...

le 30 janv. 2015

33 j'aime

24

Enfant 44
langpier
6

Immersion singulière

2015 voit sortir ce Enfant 44, adaptation du roman éponyme de Tom Rob Smith, sorti en 2008. Un certain Daniel Espinosa, connu sans être vraiment reconnu pour son travail, s'est vu confier la...

le 18 avr. 2015

31 j'aime