Laisse Lucy faire... et sa diabolique intelligence !

Lucy.
Le nom du dernier film de Luc Besson n'a pas été choisi au hasard. Il est le surnom donné au fossile d'un hominidé de type féminin datant de 3,2 millions d'années et découvert en Ethiopie. Tout un programme. Le film commence d’ailleurs par ce personnage.
Lucy, c'est un concept basé sur le postulat que l'humain actuel utiliserait une faible fraction (10-15%) de son cerveau. Cette théorie en vogue il y a quelques années a été battue en brèche par des études plus récentes qui indiquent que nous utiliserions la quasi-totalité de notre cerveau, mais pas simultanément. Il reste une part d'inconnu.
Luc Besson le sait fort bien mais, pour les besoins du scénario, il démarre sur cette théorie éculée. Il s'agit clairement de S-F après tout. Et on en prend plein les mirettes et le cortex !


Attention, spoilers !


Ce film est un mélange d'action et de réflexion philosophique qui sont savamment mélangés. Lucy, jeune femme ordinaire, se retrouve prise dans un plan foireux, très bien illustré d'ailleurs par une séquence animalière qui pourra gêner certains mais que j'estime vraiment appropriée. La tension est palpable d'emblée et Scarlett Johansson joue à merveille cette fille égarée qui ne comprend pas encore les implications de sa nouvelle condition.
Suite à un accident, Lucy se retrouve avec une capacité cérébrale en pleine évolution. C'est le début des questions et de l'escalade de la violence. Il semble qu'avec l'accroissement de son intelligence, elle perde de son humanité. La rançon d'une intelligence inhumaine en somme. Elle en a d’ailleurs conscience car deux indices sont proposés par le réalisateur : l'appel à sa mère pour lui dire qu'elle l'aime. Cela sonne comme l'adieu de quelqu'un qui sait qu'il ne va pas demeurer humain. Ensuite le baiser au policier, "pour se rappeler" lui dit-elle. Se remémorer son humanité en cours de disparition lui permet de conserver un semblant d'interaction avec ceux qui furent ses semblables.
Morgan Freeman campe un savant spécialiste du cerveau. il apporte les éléments théoriques nécessaires à la compréhension du spectateur, sans plus. Il sera confronté à l'expérimentation de sa théorie. Très spectaculaires, les pouvoirs de Lucy posent des questions existentielles. A quoi sert la vie ? Si l'on est dans des conditions satisfaisantes, à procréer et transmettre semble dire la science du film. L'humanité est-elle prête à recevoir la quintessence du savoir ? Sans doute pas à en croire le savant. Le monde d'aujourd'hui montre d'ailleurs de façon indubitable que l'être humain, s'il a accru sa maîtrise technique, n'a aucunement amélioré sa sagesse. Ce qui lui octroie le pouvoir d'impacter toujours plus son environnement, pour le meilleur et pour le pire.


Au final, Lucy, se trouvant sans doute dans un environnement qui lui est hostile, choisit l'immortalité. Ses cellules surboostées ont parlé.
Luc besson aussi. Il nous livre là un film court, condensé (trop ?), très visuel (la genèse de la planète Terre est énorme), constitué d'une séduisante hypothèse scientifique qui a le mérite de faire réfléchir (elle pourra gêner selon la perception que chacun a de l'humanité). Il va vraiment à l'essentiel sans digression aucune.
Son acolyte de toujours, Eric Serra, est aux manettes musicales. Et ça s'entend ! J'ai reconnu à plusieurs reprises des notes qui m'ont évoqué "le 5ème élément", du Serra tout craché avec le talent qui va avec. Le moment où le requiem de Mozart est utilisé est juste magique...


Ce réalisateur d'exception sait encore créer des films de S-F efficaces et profonds, à l'instar de ses tous premiers long-métrages. Un ambassadeur qui a l'intelligence de promouvoir la France à travers le monde. Dans un pays où l'on aime bien s'auto flageller, c'est plutôt pas mal.

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le 9 août 2014

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