Cher Jean-Claude,
A l'heure où tes passages télé et tes dérapages supposés sont les seules occasions de te faire revenir sur le devant de la scène de manière durable, il est triste que ton dernier film, Lukas, lui, ne sorte pas de l'anonymat du calendrier des sorties salles, plutôt paresseux en cette fin d'été 2018.
Comme d'hab' quoi. Comme pour ton réalisateur, Julien Leclercq, abonné au nombre d'entrées plutôt faiblard de chacun de ses essais, pourtant plutôt réussis, sérieux, et témoignant d'un certain savoir faire.
C'est injuste, après tout. Car tu es quand même l'un des joyaux du film. Oui, tu ne seras jamais l'acteur le plus doué de sa génération, c'est un fait. Mais tu apportes à l'entreprise tout le poids de ta vie cabossée, toute ton histoire personnelle. Toute sa souffrance intérieure, en forme de petit supplément d'âme.
Et ton visage... Ce visage brisé et fatigué parfois d'une cinégénie des plus folles, d'un pouvoir d'attraction presque magnétique. Ce visage sculpté par tes frasques, tes excès et le temps qui passe. Le temps qui semble avoir pour seul objectif de te perdre un peu plus. Depuis quand ne t'avions-nous pas vu au cinéma comme cela ? JCVD peut être ?
Il y en aura toujours pour te brocarder, tu sais, des journalistes qui se croient drôles et / ou caustiques. Ceux qui sont allés faire leur marché bio le jour où ils ont pondu leur billet, comparant ton intériorité à celle d’une laitue abandonnée dans un four en pleine pyrolyse... Ah... Ah... Ah...
Laisse-les donc pérorer, ces pisse-copies aigris, sûrs de leur humour ravageur et de leur art de la formule rance. Après tout, ce sont les mêmes qui vendaient Criminal Squad comme un fleuron de la série B burnée. Faudrait peut être qu'ils ouvrent un dictionnaire, le truc qui leur sert sans doute à caler leur table basse, à la lettre C... Comme castrée.
Ce que n'est pas, à coup sûr, Lukas. Sec comme un coup de trique, dégraissé à l'extrême, allant droit au but, le film est sombre comme la nuit, désenchanté et amer comme le regard que l'on porte sur une vie que l'on a foirée. Le tout emballé avec la maîtrise millimétrée de Julien Leclercq, qui se permet même quelques superbes plans séquences qui te collent aux basques. La facture technique de l'ensemble est très bonne, en forme de thriller nerveux et tendu de bout en bout, tant tu sembles pris au piège, tant aucune issue ne semble s'offrir à ton personnage, qui prend parfois des allures de fantôme urbain.
Lukas est donc une vraie série B, dans le bon sens du terme : le plus généreux et spontané. Même s'il recèle certaines grosses ficelles niveau intrigue, le film n'en demeure pas moins sympathique et réussi, loin des DTV dans lesquels tu t'obstines à te compromettre.
Allez Jean-Claude, il est peut être là, après tout, le bout du tunnel.
Bien à toi,
Behind_the_Mask.
PS : Pourras-tu me montrer un jour comment tu réussis à faire le grand écart sans pour autant craquer ton pantalon ?