Le film rappelle un peu Je suis un évadé en 1932, où Paul Muni symbolisait le forçat de ces établissements pénitenciaires du middle west américain, où les travaux forcés dans les champs ou au bord des petites routes de campagne étaient particulièrement durs. Comme Muni, Paul Newman représente le courage indomptable et la nature rebelle d'un homme qui refuse de se laisser briser par les contraintes carcérales strictes, en cela, ce film est une formidable ode à la liberté.
Agressif et gouailleur, volontairement obstiné, Newman trouve là un de ses plus grands rôles (dommage que l'Oscar lui ait échappé) avec celui de Hud dans le Plus sauvage d'entre tous, drame magnifique où il campait un néo cowboy détestable, mais sa morgue finit par exaspérer les gardiens qui finiront par l'humilier. Au final, après une évasion et à bout de force, l'issue sera tragiquement logique, mais Luke aura montré qu'on peut se dresser contre un système et le défier, si puissant soit-il.
Le réalisateur Stuart Rosenberg qui travaillait pour la première fois avec Newman (ils se retrouveront à d'autres reprises), sait décrire habilement cette gamme de relations d'abord conflictuelles puis complices et admiratives qui vont s'établir entre Luke et ses camarades. Les grands perdants seront finalement les gardiens et le système pénitenciaire. Le film reste célèbre pour une scène insolite, celle où Newman est capable d'avaler 50 oeufs durs pour gagner un pari ; j'ignore comment a été tourné cette scène, mais connaissant le perfectionnisme de l'acteur, je le crois capable d'en avoir gobé pas mal, juste pour se rendre compte de l'effet, c'est la méthode Actor's Studio.
Un des meilleurs films de "prison", où Paul Newman utilise son jeu Actor's Studio avec ses mimiques comme le faisait aussi Brando, d'habitude ces tics m'agacent un peu, mais là le décor et le ton s'y prêtent ; il est bien entouré par de bons seconds rôles, notamment un rude George Kennedy, suivi par des acteurs comme Strother Martin, J.D. Cannon, Morgan Woodward, Clifton James, Dennis Hopper et aussi Jo Van Fleet dans le rôle de la mère qui est l'objet d'une très belle scène.