Le film, joliment enveloppé par la musique de Saint-Saëns, fait une formidable collection d’une centaines de films « Les vues Lumière » organisés en petits chapitres tout simples « Famille » « Paris » « Comédie » « Lyon » « Le Monde » etc.
On retrouve les plus connus en tête de gondole (L’arroseur… ; L'arrivée… ; Le déjeuner… ; et puis bien sûr La sortie des usines… en deux versions dont la deuxième serait sans doute l’originale vraie).
Mais surtout des petites merveilles inconnues et belles : des gares, une enfant souriant à la caméra au Vietnam, le laborieux entraînement des chasseurs-alpins, une famille d’acrobates, un squelette dansant (Méliès, l’avais-tu vu ?), la démolition-construction d’un mur, une danse colorée splendide, des parties de boules et de cartes, New-York-Berlin-Moscou-Paris-Lyon-LaCiotat début XXème, et puis d’autres moments pleins et riches, captures mouvantes de l’époque.
Car si le film rend au cinéma un formidable aperçu de ses premiers pas, il s’agit aussi d’une fenêtre ouverte sur la vie, les gens, personnes, le comment-vivaient-ils en 1900 (mieux que nous ?), la vie juste, oui, et les moments de la journée, ce qu'ils faisaient, et ceux-là, et eux... Je trouve que l’on touche ici à ce que le film a de plus éclatant : restituer l’époque avec grâce sans superficialités. Implicitement, puisque non-sujet.
Il y a, aussi, les commentaires, astucieux car il est vrai que le temps assis aurait pu être long (c’est d’ailleurs un excellent baromètre d’appréciation au cinéma : avez-vous mal aux fesses devant le film ?) avec un aspect éducatif un peu ludique sur la construction de tel plan, la façon de poser – ici – la caméra et l’explication de l’ossature des images, invisible pour des yeux naïfs. Les anecdotes sur les opérateurs Lumières éparpillés en France et dans le monde, cinéastes-reporter et leurs consignes, la recherche de l’exceptionnel qui fera mouche, de l’exotisme, et celles sur les films des deux frères, plus intimes : la vie familiale au centre.
Bon, j’ai regretté les éloges parfois trop appuyées – je préfère me dire moi-même que c’est magnifique - et quelques moments lents.
Voilà, il faut aller s’asseoir en tailleur sur le plancher mansardé du grenier, ouvrir les vieilles malles, prendre l’album sur les jambes et naviguer dans les pages qui se tournent. Douce cinétique (du dimanche soir par exemple).