Un film tourné en 1942 qui fait l’éloge de l’amour et de la légèreté, c’est possible ? Oui, Leo Mc Carey l’a prouvé. Tout commence à Vienne, en 1938. Katie O'Hara (Ginger Rogers), une jeune chanteuse américaine, épouse un riche baron autrichien proche des nazis, ce qu'elle préfère ignorer. Patrick O'Toole (Cary Grant), journaliste mondain, américain lui aussi, enquête sur ce mariage. Dans une scène hilarante, il se fait passer pour un tailleur auprès de Katie pour glaner quelques informations sur sa future lune de miel avec le baron Von Luber. Entre Cary Grant et Ginger Rogers, c’est l’amour au premier regard. Au premier sourire. L’amour et l’humour - la complicité immédiate. Ces deux-là se comprennent à demi-mot. Ils savent que la vie est une plaisanterie et que le corps a plus de choses à dire que l’esprit. Ils savent que le nazisme est une infamie. Mais Ginger s’en va en lune de miel avec son mari. Cary décide alors de les suivre à travers l’Europe - Europe qui tombe sous le joug nazi à chaque arrivée du couple : Vienne, Prague, Varsovie. « Chaque fois que mon mari m'emmène quelque part, le pays est aussitôt envahi », se plaint l'héroïne. Sous la comédie, c’est la tragédie. Les bombardements font rage. Les nazis pourchassent les juifs. Les deux personnages principaux prennent conscience de la gravité de la situation. Ginger donne ses papiers à une jeune juive qui arrive à s’enfuir avec ses deux enfants. Cary vient à son secours. Il essaye d’extraire sa bien-aimée de la pesanteur de la guerre pour l’emmener vers la lumière de la liberté. Et ça marche. Cary, tu as encore réussi ton pari.
Le pari de faire rire les spectateurs - aussi. Quelle puissance comique ! Cary, c’est l’art du cinéma muet et du parlant réuni dans une seule et même personne. Leo Mc Carey ne s’y est pas trompé, lui qui a dirigé les plus grands acteurs comiques – des Marx Brothers à Laurel et Hardy. Mais Cary a quelque chose de plus : le charme, le tact, l’élégance et une beauté à couper le souffle. Et Leo Mc Carey le sait. Dans une scène d’une grande poésie, il nous présente le visage de l'acteur endormi, l'air épanoui, le sourire aux lèvres. Ginger Rogers s’approche de lui et Cary Grant lui avoue ingénument qu’il rêvait d’elle. Nous avons toutes les raisons de le croire… Ce film, c’est comme une parenthèse enchantée au milieu des tourments de la guerre. Un peu de poésie dans un monde de brutes.

MarieE
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le 14 mai 2018

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