Bientôt un siècle, vraiment ? Autant au niveau de la qualité de l'image on le sent, autant pour le scénario et certaines trouvailles visuelles géniales M le maudit pourrait être de la dernière décennie.
L'histoire nous plonge au cœur de Berlin dans lequel un tueur en série sévit, s'en prenant aux petites filles (la pédophilie n'est qu'implicite mais bien réelle). La population commence à devenir parano et le moindre adulte vu en train de s'adresser à un enfant est suspect. L'effet de masse est donc un des nombreux autres aspects de sociétés traités avec brio dans l’œuvre.
La mélodie sifflée et les yeux exorbités de M sont des éléments qui reviennent sans arrêt. Chacun provoque un sentiment de mal aise, l'un par le drame qu'il annonce, et l'autre par l'expression vraiment saisissante de la terreur. Cette terreur ressentie par M est autant due à la peur d'être découvert qu'à ce qu'il évoque en fin de film.
Concernant les trouvailles, on peut parler de cette scène au début du film. La maman d'Elvie l'attend et l'appelle alors qu'on nous montre les escaliers vides, l'horloge qui tourne irrémédiablement, on entend des pas mais ce ne sont pas ceux d'Elvie, le grenier est vide comme amplifiant l'appel de la mère, la place d'Elvie devant laquelle refroidi son repas, puis les jouet de la fillette comme tout juste perdus de ses mains... M devra faire face au ballon de la fillette plus tard.
J'ai aussi en tête, comme tout ceux qui ont regardé le film j'imagine, la réunion des bandits qui se confond mot pour mot, geste pour geste avec celle de la police, mettant en doute l'intégrité des policiers bien qu'elle ne soit pas mise à mal ultérieurement. Super astuce de montage.
On peut également évoquer ce long plan magique au milieu des mendiants, tourné en continu, magnifique par la minutie des détails montrés, participant au réalisme de l'univers.
M le maudit s'impose en chef d’œuvre par son ambition réussie de profondeur à tout point de vue, son originalité scénaristique, son rythme alternant judicieusement tragédie et calme, son utilisation brillante de la bande son et son traitement intelligent de thèmes délicats.
Mes yeux profanes saisissent que ce film est tout simplement exceptionnel et hors du commun, donc peut-être que certains de nos cinéastes contemporains devraient revoir ce véritable dictionnaire.