Mademoiselle
7.6
Mademoiselle

Film de Tony Richardson (1966)

Une petite partie en spoil, il vaut mieux voir le film avant de lire ces 2/3 lignes ^-^


C’est tapie dans l’ombre de sa respectabilité que, pour tromper l’ennui, l’insoupçonnable tigresse laisse le champ libre à ses griffes. Jeanne Moreau, le visage fermé, le verbe blessant, est d’une justesse rare dans cette fable noire macabre qui prouve que l’on peut imager une violence sourde, un mal sévère, sans se laisser aller à la surenchère. Mademoiselle sèche les coeurs mais avec finesse : sa photographie précise ne laisse guère l’objectif s’attarder sur l’insoutenable comme ce serait probablement le cas si le film était réalisé aujourd’hui : à l’inverse, quelques plans bien choisis, des bêtes à terre en train de mourir, de braves âmes en train de risquer leur vie pour leur venir en aide, un dialogue rugueux à l’encontre d’un enfant perdu, permettent à Tony Richardson de dessiner les contours d’un portrait empli d’une vilainie qui fait froid dans le dos. Cette mademoiselle, que tout un chacun respecte dans le village, est probablement l’une des méchantes les plus détestables qu’ait pu enfanter le 7ème art, ni plus, ni moins.


Mademoiselle n’est par ailleurs pas sans rappeler Fury de Fritz Lang ou Panique de Julien Duvivier dans sa manière d’anticiper de manière peu flatteuse la bêtise humaine quand cette dernière influence les réactions d’une population en proie à la peur.


Chacun prenant son voisin à partie pour se conforter dans ses à priori, avant de se faire juge et bourreau de cet inconnu un peu trop brave, un brin trop enjoué, et surtout trop populaire auprès de la gent féminine, pour être honnête.
Le dernier acte est d’une beauté graphique aussi magistrale que ce qu’elle dessine est d’une horreur sans nom. Les silhouettes qui dessinaient à l’horizon un érotisme subtil particulièrement émoustillant troquent brins d’herbe et caresses pour des haches affûtées porteuses d’une sentence précipitée. Rares sont les films à conjuguer aussi savamment crédibilité et violence radicale d’un sous-texte on ne peut plus limpide.


Quant à cette fin audacieuse qui permet à Tony Richardson d’aller au bout de son propos sans fléchir, elle est d’une pertinence troublante en plus d’être surprenante. On a tellement l’habitude que la bonne morale l’emporte sur le bon sens à l’écran, que quand l’inverse se produit, un profond respect naît du chaos. Il est même double, voir triple ici : pour l’homme aux commandes forcément, de quoi faire naître l’envie d’en voir plus, mais aussi pour David Watkin qui signe une photographie assez dingue en jouant avec les clairs/obscurs non sans une certaine magie, et pour Jeanne Moreau, enfin, qui joue des griffes avec l’agilité d’une vraie féline, tour à tour glaçante, intimidante, attirante et pourtant profondément détestable.


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Les captures pour donner envie, c'est par là ! :)

oso
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le 23 juil. 2018

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oso

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