Mademoiselle
7.6
Mademoiselle

Film de Tony Richardson (1966)

Dans un petit village de la France d'après-guerre, une institutrice tirée à quatre épingles cache en fait un lourd fardeau : elle vit un refoulement sexuel et pour se venger, décide de détruire secrètement le village soit en l'inondant, soit en y mettant le feu ou en empoisonnant l'eau. Cependant, elle ne sera jamais inquiétée et la police va se demander si le bucheron italien n'y serait pas pour quelque chose dans les tentatives de nuire à ses habitants.

Dans un personnage totalement opaque, Mademoiselle, dont on ne connaitra jamais son nom, est incarnée par une Jeanne Moreau fantastique. C'est bien l'adjectif, car dans sa manière très classique de s'habiller, son physique peu féminin au possible, sa raideur, elle dénote avec les autres habitants. Si son refoulement sexuel n'est pas vraiment expliqué, cela va jusqu'à une scène où se scotche les tétons pour faire disparaitre encore plus sa part de féminité. Mais elle va retrouver une forme de désir déviant devant ce bucheron italien, jusqu'à un rendez-vous assez pervers dans la nuit où elle ira se montrer effroyable.

Ce bucheron, joué par Ettore Manni, est un peu considéré comme un paria du fait de sa nationalité. Dans une France sortant de la guerre, inutile de faire un dessin ; il est clairement le suspect idéal. Le personnage est assez touchant car comme il parle assez mal français, il est lui emporté dans un engrenage infernal.

Quelque part, j'ai pensé à Mouchette, le film de Bresson sorti plus tard, car on y retrouve ce noir et blanc charbonneux, cette description de la France rurale, et un personnage féminin sans nom dans les deux cas.
Tony Richardson a fait le choix d'une approche réaliste, voire naturaliste, avec l'absence de la musique (comme chez Bresson !), ce noir et blanc, et surtout cette ambiance de délation qui règne d'un côté comme de l'autre.

Il s'avère que si Mademoiselle est un film ignoré aujourd'hui, ce fut un choc à l'époque, et la confirmation du talent immense de Jeanne Moreau, alors capable de tenir un film difficile sur ses épaules.
Boubakar
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le 19 nov. 2014

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