Il y a quelque chose d'attachant dans Magic qui tient à de nombreux facteurs. Déjà, voir Anthony Hopkins presque jeune dans le rôle de ce magicien raté, timide et à l'anxiété galopante, plus de 10 ans avant sa composition de Hannibal Lecter dans Le Silence des agneaux, c'est quelque chose. Je l'ai trouvé assez juste dans l'interprétation de ce personnage glissant vers la folie (à l'extérieur en tous cas, de ce qu'on peut juger, peut-être que c'était déjà le chaos avant dans sa tête), sans en faire trop dans l'introversion, ni dans le trouble dissociatif de l'identité : même si on sait très bien où cette histoire va nous mener avec des yeux de 2024, ça se regarde avec un minimum de plaisir tout du long.


Un des points qui auraient pu être approfondis pour améliorer l'ensemble, c'est la relation qu'il entretient d'une part avec son manager (Burgess Meredith) et d'autre part avec son ancienne amie (Ann-Margret). Le premier dans le registre de l'emprise qui change de camp et dans la soudaine prise de conscience de l'étendue d'un souci qu'on pensait mineur, et la seconde dans celui de la relation délicate où les deux personnalités s'expriment de manière trop antagoniques pour tenir sur la durée. En tout état de cause, Richard Attenborough réussit avec l'aide du scénariste William Goldman (auteur du roman adapté ici) à faire exister son protagoniste, et laisser le temps à tous ses travers de s'exprimer — son numéro de ventriloque n'arrive que bien tard, une fois établies les limites de son jeu de simple magicien. La marionnette devient un ressort comique évident, contraste idéal avec son incapacité à s'affirmer, faisant de lui une star en devenir.


Magic se transforme ainsi peu à peu en étude de l'influence de la marionnette sur son créateur, comme si c'était elle qui gouvernait le bras, et cette perte de contrôle se fait dans une progressivité intéressante qui cède le pas à un thriller plutôt bien ficelé, sans génie mais avec beaucoup de talent. La psychologie du protagoniste est le carburant principal du film qui vire de plus en plus à l'horreur et à la suggestion (on image bien ce que le héros se représente sans toutefois céder à l'hypothèse fantastique, ce que je trouve bienvenu). On sent que le contenu arrive un peu à bout de souffle avant la fin et se contente de recycler la même idée dans un chaudron de plus en plus violent, quelque part entre Chucky et Psycho, avec une particularité du côté du romantisme impuissant d'un personnage étonnamment complexe.


https://www.je-mattarde.com/index.php?post/Magic-de-Richard-Attenborough-1978

Créée

le 27 nov. 2024

Critique lue 13 fois

2 j'aime

Morrinson

Écrit par

Critique lue 13 fois

2

D'autres avis sur Magic

Magic
Zogarok
8

Critique de Magic par Zogarok

Treize ans avant d'entrer dans la peau d'Hannibal Lecter pour Le Silence des Agneaux, Anthony Hopkins incarnait avec excellence un grand anxieux dans Magic (névrosé apparemment – schizophrène...

le 7 mars 2015

11 j'aime

Magic
Fatpooper
7

Distraction

J'avais peur de voir un mauvais film d'horreur comme beaucoup d'acteurs en ont fait au début de leur carrière, mais en fait ça passe plutôt bien (bon, ok, ça faisait déjà 12 ans que Hopkins travaille...

le 11 oct. 2015

10 j'aime

2

Magic
Boubakar
7

Poupée de cire, poupée de sang...

Un magicien, qui pratique également la ventriloquie, se fait de plus en plus posséder par sa poupée, qui lui sert à dire tout haut ce qu'il pense tout bas lors de ses spectacles... C'est peut-être la...

le 9 nov. 2021

9 j'aime

Du même critique

Boyhood
Morrinson
5

Boyhood, chronique d'une désillusion

Ceci n'est pas vraiment une critique, mais je n'ai pas trouvé le bouton "Écrire la chronique d'une désillusion" sur SC. Une question me hante depuis que les lumières se sont rallumées. Comment...

le 20 juil. 2014

144 j'aime

54

Birdman
Morrinson
5

Batman, évidemment

"Birdman", le film sur cet acteur en pleine rédemption à Broadway, des années après la gloire du super-héros qu'il incarnait, n'est pas si mal. Il ose, il expérimente, il questionne, pas toujours...

le 10 janv. 2015

140 j'aime

21

Her
Morrinson
9

Her

Her est un film américain réalisé par Spike Jonze, sorti aux États-Unis en 2013 et prévu en France pour le 19 mars 2014. Plutôt que de définir cette œuvre comme une "comédie de science-fiction", je...

le 8 mars 2014

125 j'aime

11