Corky Withers (Anthony Hopkins, magistral), un magicien ventriloque, est au faîte de sa gloire, à la grande joie de son agent (Burgess Meredith). Mais les relations entre les deux commencent à se disloquer lorsque Withers refuse absolument de faire une visite médicale, craignant que l’on découvre son secret et celui de sa marionnette…
Après trois changements de réalisateur (Norman Jewison et Steven Spielberg étant les deux premiers) et d’acteur principal (Jack Nicholson puis Robert De Niro ayant successivement décliné), c’est sur les noms de Richard Attenborough derrière la caméra et d’Anthony Hopkins devant que s’arrêta définitivement le choix de la production.
Si la réalisation de Richard Attenborough, quoique bonne, aurait sans nul doute pu être égalée par ses deux prédécesseurs, le choix d’Anthony Hopkins, lui, relève du pur génie. De fait, il nous livre ici une composition absolument magistrale dans ce rôle éminemment complexe de magicien qui se fait petit-à-petit dévorer par une seconde personnalité, dont on ne sait plus trop si elle est la sienne ou celle d’une entité maléfique cachée dans sa marionnette.
Ainsi, la relation entre le ventriloque et sa marionnette (l’un joué, l’autre doublé par Hopkins) est montrée avec l’ambiguïté qui convient, et même si le film hésite un peu trop à prendre la voie du fantastique (même s’il ne la rejette jamais, notamment dans sa scène finale), la double prestation d’Hopkins réussit parfaitement à instaurer le malaise qui rend le spectateur nerveux face à un spectacle dérangeant à souhait, sorte de Dr. Jekyll et M. Hyde ou de Psychose transposé dans les années 70.
Il faut dire qu’Attenborough montre une belle aisance à se glisser dans le sillon du génie hitchcockien pour les ambiances poisseuses et malaisantes, sans jamais basculer dans l’outrance. En effet, la réussite de ce film, c'est de ne pas chercher à faire de l'horreur (ceux qui le classent dans cette catégorie font de la publicité mensongère) mais à mettre davantage en avant le drame et le thriller, ce qui lui permet de bien étoffer chacun de ses personnages sans jamais chercher un spectaculaire de mauvais aloi.
Si les amateurs d’épouvante et de sensations fortes pourront rester sur leur faim, il n’empêche que la présence d’un casting intégralement parfait (Ann-Margret et Burgess Meredith sont eux aussi excellents), et la mise en scène du réalisateur, qui sait mettre de la tension dans des scènes apparemment banales, remédieront parfaitement au « problème » pour les spectateurs recherchant un bon thriller psychologique.
Si l’ensemble aurait néanmoins gagné à revêtir encore un peu plus d’ambiguïté voire à susciter un peu plus l’effroi sans renoncer à son fond pour autant, il tient pour autant parfaitement la route, et traite admirablement du sujet de la double personnalité, bien mieux que la plupart des œuvres postérieures qui y ont tenté leur chance.