Changement de contexte, on troque les petites ruelles coupe-gorge de Paris pour l'air pur de la campagne, mais on y retrouve les mêmes ordures et la même recette, qui une nouvelle fois a su me convaincre et ce n'est pas peu de le dire.
C'est simple, je trouve Gabin vraiment parfait dans la peau du commissaire Maigret, force tranquille qui prend le temps de rassembler ses atouts maîtres avant de prononcer l'échec et mat du coupable sans pitié aucune ce coup-ci, contrairement au précédent.
Il faut dire que cette fois le mobile du meurtre est aussi limpide qu'il est vieux comme Hérode, à savoir des histoires de gros sous, ce qui le rend forcément un peu moins intéressant puisque traité de multiples fois que ce soit dans la littérature, le cinéma ou ailleurs.
Mais une nouvelle fois ce sont les personnages qui font tout le sel de ce second Maigret par Gabin. A l'instar de Jean Desailly dans Maigret tend un piège, Michel Auclair incarne l'adversité théâtrale en roue libre, et Gabin le titille d'ailleurs clairement à ce propos en lui réclamant ses effets d'acteur au moment ou l'homme semble être en fâcheuse posture. Un régal pour quiconque apprécie les dialogues savoureux et les voix assurées qui les interprètent. Surtout quand ce choix de style s'inscrit dans une adaptation qui se veut didactique afin d'épouser la volonté de Jean Delannoy d'impliquer le spectateur dans sa chasse à l'assassin, en prenant le temps de contextualiser l'ensemble des suspects en présence.
Pour ma part, je me suis à nouveau beaucoup amusé, si bien que les quelques défauts du film (certains seconds rôles un poil justes à l'image des père et fils Gaultier ou certaines ficèles d'écriture comme par exemple le petit tour de Gabin sur le territoire d'Arlette pour épier un journaliste questionnable) ne m’ont aucunement entaché la séance.
Et puis ce second film a surtout pour lui la puissance de son final : Gabin qui sort enfin de sa coquille pour laisser s'exprimer un tempérament revanchard qui réclame réparation, c'est quelque chose d'assez dingue à l'écran. Sacrément puissant, une nouvelle preuve, si besoin était, de tout le charisme qu'il pouvait déployer devant une caméra.