Grand Prix à Gerardmer en 2013, "Mama", co-production entre l'Espagne et le Canada, est l'adaptation du court-métrage du même nom également réalisé par Andres Muschietti.
Débutant son film par la mention "Il était une fois...", Muschietti nous plonge dans un pur univers de conte, aspect renforcé par une photographie automnale absolument sublime, digne d'une illustration d'un conte des frères Grimm, et par le détournement des codes qui lui sont propres, à commencer par le personnage habituel de la belle-mère, ici représenté à la fois par une mère de substitution aussi surnaturelle que possessive et une autre, bien réelle mais n'ayant pas tout de suite l'instinct maternel, interprétée avec conviction par une Jessica Chastain étonnante et limite méconnaissable.
Les rapports d'abord conflictuels, puis fusionnels, entre la mère improvisée et les deux gamines revenues à l'état sauvage suite à une longue captivité, sont le point fort d'un train fantôme un peu trop influencé par le cinéma fantastique espagnole et par les autres productions Guillermo Del Toro (on pense forcément à "L'orphelinat" ou au mésestimé "Don't be affraid of the dark"), qui peine dans sa seconde partie à justifier la transposition cinématographique, le scénario ayant sûrement gagné à virer tous les personnages masculins, parfaitement inutiles, à commencer par ce pauvre Nicolaj Coster-Waldau, pas mauvais mais rapidement mis de côté.
Tapant plus que de raison dans la ghost-story classique au bout d'une heure, "Mama" recèle cependant de pures merveilles, qu'il s'agisse d'une poignée de séquences oniriques belles à se damner, d'une suggestion d'une maîtrise fulgurante (la scène de la gamine jouant dans sa chambre avec un compagnon invisible dont on ne distingue que partiellement l'ombre sur le mur est démente), d'une interprétation exemplaire (les deux petites filles sont impeccables, surtout la plus jeune), d'une créature aussi flippante que tragique ou encore d'un final jusqu'auboutiste d'une poésie proprement bouleversante.