Man on the Moon c'est l'histoire d'un Pierrot moderne (70's-80's), atypique et lunaire (forcément)...
Lunaire à l'image de l'humoriste dadaïste Andy Kaufman dont Milos Forman nous conte ici l'ascension américaine jusqu'à on-ne-sait-pas-trop-quoi-finalement...
Et atypique à l'image de cette première scène surréaliste - presque gênante - où l'on découvre l'acteur Jim Carrey testant déjà notre capacité à supporter le génial précurseur de l'absurde et de la provocation qu'il incarne à la perfection.
Mais revenons aux débuts de la carrière du jeune homme.
Andy traîne d'abord sa "lose" dans les bars où il accepte même de jouer gratuitement, par amour pour son "art". Mais son numéro totalement décalé atterre à ce point la faune locale qu'il se fait virer ; tandis que le spectateur que nous sommes le prenons déjà en pitié (l'effet Carrey "acteur de génie pathétique" probablement). Mais avant de tirer sa révérence, encapuché comme un alien, son "ex-employeur" lui prodigue quelques conseils s'il veut espérer rebondir ailleurs. Un accent ridicule et une imitation au poil du King Elvis plus tard, et le voilà repéré par son futur manager, interprété par un Danny deVito presque abonné au genre. Sauf que sur ce dernier point, il s'agit très certainement d'un clin d'oeil au sitcom Taxi dans lequel Andy sera engagé contre certaines de ses exigences pour le moins farfelues.
Et c'est alors qu'interviendra un certain Tony Clifton, le double maléfique d'Andy. Un chanteur de cabaret vulgaire, aux exigences insensées, bagarreur et imbu de sa personne, mais surtout... très mauvais chanteur. Je ne vous en dirai pas plus, mais si vous allez sur Youtube mater un de ses sketches, vous découvrirez qu'il est bien moins caricatural que dans le film, et bien plus drôle... Alors pourquoi forcer le trait à ce point ? Surtout que l'oeuvre de Milos Forman, déjà hystérique par moments, n'avait rien à y gagner de mon point de vue...
"Faire semblant d'être un sale con c'est ce que je fais le mieux"
La réalité, c'est que ce grand enfant d'Andy se servira de ce second personnage pour exorciser ses démons intérieurs (scène du bordel hilarante), lui qui semble si doux à priori, mais surtout à jouer avec la production pour obtenir des émissions spéciales. Et, comme il n'arrêtera pas de le faire tout au long de sa carrière, à manipuler tout son petit monde, ainsi que le public, sans le moindre scrupule. Son double but dans la vie : faire rire et faire le show. Quitte à ce qu'à chaque fois ça finisse en baston ! ^^
Mais à trop crier au loup... Il se pourrait bien que ce dingo d'Andy réussisse son autre coup : passer à la postérité ! La preuve avec l'existence de ce biopic. ;)
Un hypersensible déstabilisant donc, impertinent et poétique, mystique aussi, pas toujours drôle (comme le film, qui a ses quelques moments un peu pénibles) mais souvent génial (comme le film, qui ne cesse de nous surprendre), à l'image de ce sublime final en trois temps qui nous fera passer par toutes les émotions ! :')
Un personnage brillamment interprété qui nous questionne sur ce qu'est l'humour, et surtout ses limites. Parce que le miracle de la vie c'est aussi de pouvoir en rire, surtout lorsque le maître arnaqueur se fait ultimement arnaquer... Ou pas...
Quoi qu'il en soit, les clowns tristes ont eu un roi, et ce roi, me semble-t-il, a réussi à décrocher la lune.
Comme un symbole, je conclurais bien par cette réplique balancée après le ras-le-bol du public vis-à-vis de son grand cirque de catcheur misogyne : "C'était un grand moment pour la psychologie en général."