Les campagnards sont mauvais.
Manhunt est un énième slasher sur le thème "des citadins partent en vacances à la campagne et s'amusent vachement jusqu'à ce que tout un village de congénitaux de la cambrousse essaient de les massacrer". Là où Severance propose le thème des est-européens en colère contre une société d'armes qui leur a gâché la vie pendant la guerre civile, The Hills Have Eyes celui des victimes d'essais nucléaires en colère contre le reste de l'Amérique, Manhunt fait simple. Ils sont Norvégiens. Ils sont campagnards. Ils aiment pas les gens de la ville. Ils aiment chasser.
Le film lui même est plaisant, tout d'abord parce qu'on y parle Norvégien un peu, mais surtout parce qu'il n'y a plus une ligne de dialogue après le premier quart d'heure, et dieu sait que c'est rafraîchissant dans un genre où après une bonne décennie de recherche je n'ai toujours pas trouvé un personnage de traqué que je n'ai pas eu hâte de voir trucidé à l'arme blanche.
Pour ce qui est du contenu, autant le dire sans plus attendre : c'est un slasher, donc le scénario est puant. L'idée de départ est insipide, la première péripétie qui lance les hostilités n'a juste aucune base logique ("Arrêtez la voiture, j'ai envie de vomir. Oh btw ! Trois mecs essaient de me tuer depuis quelques jours, ouais, d'où les tremblements et les yeux de tarée. Ah ben d'ailleurs les voilà"), les traqués sont tous antipathiques, les chasseurs sont des débiles profonds (mention spéciale au passage où l'héroïne s'en rend soudainement compte et se dit tout naturellement "bon bah, plus qu'à les buter un par un"), la fin est ridicule.
Par contre, le film est esthétiquement magnifique. Le filtre sépia, habituellement à vomir, est ici superbement exploité, et la gamme de couleurs sent bon la forêt glaciale. L'hémoglobine est utilisée à bon escient, ni trop ni pas assez, et les blessures, estafilades, pièges et autres devoirs sur table de deuxième année de CAP Charcuterie sont anatomiquement crédibles, ce qui est assez rare pour être souligné. La bande son est exceptionnellement flippante : entre sons de la nature, sifflements des chasseurs, halètements et chuchotements des proies, et (oui, j'insiste) l'absence totale de mots, l'immersion est une réussite. Le film est très bien découpé, les scènes de battement où les traqués guettent les chasseurs qu'ils croient entendre près d'eux sont parfaitement dosées et tiennent en haleine, là où elles ont eu tendance à faire trembler mon index d'ennui au-dessus de la touche fast-forward dans d'autres films.
Bref, c'eût été un chef d'oeuvre si le scénariste s'était un rien creusé la tête pour donner du fond à ses personnages et à son intrigue. Le film aurait probablement bénéficié d'un petit zeste d'humour dont il est totalement dénué, mais ça touche à la conception que je me fais d'un bon slasher, et j'admets le caractère subjectif de ce reproche.
Une bonne surprise.