Le duo français formé par Alexandre Aja et Franck Khalfoun poursuit un travail de recréation de classiques de l'horreur gore amorcé avec La Colline a des yeux (2006) ou Piranha 3D (2010), s'attaquant ici à un monument du slasher un peu particulier, le Maniac de William Lustig (1980). Pour l'anecdote, "lustig" signifie "rigolo" en allemand, qualificatif que l'on peut difficilement associer à un cinéma aussi extrême. Soit l'histoire d'un jeune homme célibataire et psychopathe, dont l'enfance fut marquée par le spectacle de sa mère se donnant à toutes sortes d'hommes sous ses yeux, et qui passe son temps à restaurer de vieux mannequins qu'il agrémente des scalps de jeunes femmes qu'il assassine sauvagement.
Du film original, Khalfoun (ici à la réalisation) retient le point de vue subjectif, qui est conservé du début à la fin avec rigueur et quelques effets un peu plus arty parfois agaçants et superflus, sur les séquences de migraines. Outre ces défauts, le procédé confère au film une belle ambiance angoissante et étouffante et lui permet de développer toute une scénographie des regards plutôt intéressante : jeux de miroirs et de reflets, mouvements de caméra subtils qui essaient d'en nier l'existence, regard du tueur sur ses victimes, de ses victimes sur lui, et surtout, de lui sur lui-même :
en effet, à quelques moments la caméra se dissocie du tueur pour le montrer en train de tuer sans l'artifice d'un miroir. Ces scènes sont à attribuer à la schizophrénie du personnage, à l'origine des meilleurs moments du film. Revivant sans cesse les scènes traumatiques de son enfance, il vit dans un véritable harem de poupées et de scalps, sa mère prenant le dessus en lui quand il essaie de coucher avec une femme. On pense évidemment à Psychose (1960), qui fut également inspiré par le psychopathe Ed Gein.
Elijah Wood, que l'on voit peu à cause de ce procédé, joue ce rôle dans une déambulation hallucinée permanente plutôt réussie. Moins convaincante est sa partenaire Nora Arnezeder, dont l'accent français appuyé et le jeu trop candide finissent par lasser. De manière générale son personnage d'artiste est parfaitement caricatural. La musique de Rob est excellente et joue beaucoup pour l'ambiance du film, les séquences de meurtres qui émaillent le film sont gores, réalistes et plutôt terrifiantes, mention spéciale à l'assassinat dans un parking d'une danseuse et la mort d'une impresario sur fond d'Ave Maria de Schubert. La fin apocalyptique déçoit un peu, malgré une ultime séquence absolument horrifiante et dont la teneur ne sera pas dévoilée. Il y a donc à boire et à manger dans ce plaisant film de genre qui ménage quelques beaux moments de terreur mais n'évite pas certaines lourdeurs et les effets de manche.