Maniac par Remy Pignatiello
Il y a une grande tristesse mélancolique dans ce remake de Maniac, probablement le résultat d'une combinaison de changements souvent efficaces mais parfois casse gueules.
Evacuons les évidences, le choix d'Elijah Wood en remplacement de Joe Spinell envoie le film dans une toute autre direction que le document guerilla urbaine de Lustig. Dans ce Maniac 2013, on se situe plus dans une démarche arty (parfois trop) que dans un ensemble ultra cheap mais vraiment glauque.
Du coup, ce que Maniac perd d'un côté, il le gagne d'un autre : là où Spinell incarnait l'horrible devant la caméra, avec son physique de gros porc suant, l'équipe Aja / Khalfound / Wood place l'horrible dans la caméra.
Nous ne sommes plus spectateurs de l'acteur, mais spectateurs de l'action.
Pour autant, ce n'est pas tant ça qui formalise les points les plus intéressants de Maniac, mais plutôt l'écriture abstraite d'un schizophrène patent, essayant tant bien que mal de se rapprocher d'une certaine normalité. Au milieu de tout cela, les meurtres n'apparaissent plus tant choquants que profondément attristants, faisant le plus souvent de nous les spectateurs d'une folie incontrôlée créant une véritable pitié pour ce nouveau Frank Zito.
Et c'est là que le choix de Wood fait sens : créer un personnage plus proche du spectateur lambda, et plus éloigné d'un certain cliché de l'asocial type. Qui plus est, les traits physiques de Wood en font un type plus à même de pouvoir (essayer de) séduire des nanas ci et là, que ce soit pour assouvir ses pulsions comme pour essayer, donc, d'avoir une relation normale.
C'est aussi là la principale limite du film : tant que celui ci reste assez abstrait dans ces personnages, il est très efficace à générer une ambiance profondément triste, que ce soit à coup de flashbacks, de nappes musicales mélancoliques, ou d'une histoire d'amour forcément vouée à l'échec. Mais plus le film avance, et plus le script essaie de donner une épaisseur à ses personnages, mais avec des ficelles grosses comme un bras : que ce soit le petit ami et ses 3 répliques débiles, le voisin qui ne passera que 30 secondes, ou le déclenchement du climax qui tient plus de l'évacuation express que le véritable confrontation, le dernier tiers du film patine pas mal (heureusement, ça ne dure pas, la fin étant toute proche).
Au final, avec son ambiance bien foutue, le film réussit à générer une pitié pour son personnage principal. On peut facilement se sentir aussi mal pour ses victimes que pour lui (anecdote : vu aujourd'hui : Colorado de Sergio Sollima, dans lequel un personnage explique à Lee Van Cliff "la victime n'est pas toujours du côté du canon du revolver"). C'est probablement ça, la force de Maniac 2013 : rester efficace, sans rien réinventer, mais en allant dans une direction complètement différente de l'original.
Reste donc les limites béantes d'écriture, dès qu'il s'agit de dépasser les personnages et visuels symboliques.