Un documentariste doit-il utiliser des archives uniquement favorables aux personnes qu'il met en scène ? Ainsi fait Tom Volf avec"Maria by Callas", une apologie sans nuances...
Certes, Maria Callas fascine par sa voix et sa personnalité. Qu'elle s'exprime en grec, en anglais, en italien ou en français, sa beauté irradie l'écran. Par son perfectionnisme et au feu de sa passion, la Prima Dona acharnée au travail se forge une seconde nature. Son intégrité refuse les concessions car elle veut donner le meilleur, ne pas décevoir le public. Ses démêlés avec le directeur du Metropolitan Opera de New York sont évoqués à son avantage.
L'instinct et la lucidité la guident : "Je ne suis pas une intellectuelle, je n'ai pas le temps de lire". Le film dépeint une interprète qui se sacrifie pour son art, accepte douloureusement son destin. Son mariage avec un Italien, devenu son imprésario, vole en éclat, miné par l'ivresse d'une Gloire explosive. En 1958, Maria devient la maîtresse d'Aristote Onassis, un homme marié. Nouvelle impasse. Le richissime armateur divorce... mais préfère épouser Jackie Kennedy en 1968... Maria déclare être enchaînée à son Destin. Elle aurait préféré être heureuse, mère de famille nombreuse...
A ce point de saturation, vous dites STOP !
Maria n'avait aucun défaut ? Ou Maria n'était que Callas, une Diva divine, libérée des faiblesses humaines ? Au cours du débat avec le réalisateur, je pose la question. Mais Tom Volf biaise, assure n'avoir trouvé que des documents en son honneur. Faute d'avoir cherché ? L'icône est sauve. Ave Maria pleine de Grâce !
Quatre ans après sa dernière apparition sur une scène lyrique en 1965, Maria Callas obtient le rôle titre dans le film "Médée", réalisé par Pier Paolo Pasolini. Hésiode, Euripide et Apollonios de Rhodes brossent dans leurs œuvres la puissante personnalité de Médée. Ses défauts étaient à la hauteur de ses qualités humaines (voire divines selon certains auteurs). Au contraire, Tom Volf ignore les insuffisances d'une Diva, dont il déploie l'éventail des vertus. Plaçant sur un piédestal une idole mythique, il mène de front une campagne tous azimuts en sa faveur : trois livres et une exposition accompagnent son documentaire ! L'affaire Callas rebondit, le mythe rivalisant avec une vérité plus complexe sur l'échiquier du temps.