Where the sidewalk ends, sorti 6 ans après Laura et reprenant ses têtes d'affiche, le flegmatique Dana Andrews et la sublimissime Gene Tierney, se pose comme un hériter logique de ce qu'Otto Preminger avait insufflé dans son chef d'oeuvre en 1944, pour toute cette grammaire du film noir ici portée à son paroxysme avec cette caméra qui s'attarde dans les rues sales et mal éclairées d'un New-York pluvieux et nocturne, qui filme les tourments du détective Dixon dans des appartements étouffants et lugubres, Dixon qui porte d'ailleurs en lui les gènes du héros "noiresque" par excellence: Justicier sans foi ni loi, porteur d'un passé lourd qui le hante (fils de gangster en l'occurence) et destiné quoi qu'il fasse à ne pas recevoir les honneurs inhérent à ses prouesses.
La mise en scène impeccable, nerveuse à souhait et recentrée au maximum sur les événements à l'écran au point que, en plus d'assurer un rythme soutenu au long-métrage (l'1h30 passe super vite), la composante polar s’efface souvent au profit de celle d'un film d'action pur et simple, le noir et blanc somptueux et la maîtrise des codes du genre suffisent amplement à faire passer les quelques facilités et raccourcis scénaristiques, notamment au niveau de l'enquête, un peu bâclée, ou des apparitions du gangster Scalise qui semblent juste servir synthétiquement l'intrigue plutôt que d'en être un élément naturel... De même si on peut reprocher une chose à la construction narrative de ce Mark Dixon, c'est de négliger un peu les personnages secondaires, réduits pour la grande majorité à de simples faire-valoir (Gene Tierney y compris), ce qui permet certes de recentrer l'attention sur le conflit intérieur du personnage principal qui pour le coup est remarquablement traité, mais amène aussi des défauts, la romance en devient par exemple un peu trop légère et convenue à mon goût, et le final perd du coup de son impact.
Au final c'est un film plutôt méconnu - toutes proportions gardées bien sur - qui passe un peu inaperçu aux côtés de monolithes tels que Laura justement ou encore Autopsie d'un meurtre dans la filmographie de Preminger, pourtant je conseille Mark Dixon, détective (un titre français qui si il n'a pas la grande beauté équivoque du titre original, aura au moins réussi à tirer l'essence du sujet) à tous les amateurs de films noir, tant il en est l'un des représentants les plus classiques certes, mais résolument réussi par ailleurs.