Saw & Cie... autant de "torture flicks" qui, par leur insupportable sadisme et leur constante utilisation du second degré finissaient par agacer plus qu'ils ne terrorisaient.
Frontrière(s), pour les mêmes raisons, à laquelle s'ajoute une description aussi imbécile que dérangeante du nazisme, était un film parfaitement dégueulasse... Aussi bête que moche, mal joué et répugnant.
Martyrs réussit en tous points ce que tous ses illustres prédécesseurs avaient raté lamentablement.
Une chose frappe d'abord, c'est l'incontestable talent de mise en scène Pascal Laugier.
Le film est brutal, ultra violent même, d'une violence qui repousse même les limites de ce qui peut être décrit au cinéma. Mais le film n'épouse jamais cette violence, même dans les pires scènes on ne peut pas taxer son auteur de complaisance ou le soupçonner d'une quelconque jouissance sadique.
Dans sa description minutieuse et méthodique d'une utilisation idéologique, politique ou religieuse de la torture qui évoque les pires heures de l'Histoire, et notamment le nazisme, il parvient même à décrire la barbarie humaine sans jamais l'épouser (contrairement à Frontière(s) qui finissait par ressembler à ce qu'il prétendait dénoncer) et provoque ainsi un malaise constant.
Car ce film brillant est d'un inconfort total.
D'abord parce il change constamment d'angle et nous impose un nouveau film aussitôt que l'on se croit installé dans une chose plus étiquetée, reconnue, balisée.
Et puis il y a ce déchainement permanent de violence. Point de gore ici, ça n'est ni Braindead, ni Vendredi 13, la violence ne prête jamais à rire. Il s'agit d'ailleurs d'une violence qui risque de faire reculer les plus hardis d'entre vous mais qui n'est jamais gratuite et, au contraire, nourrit le film.
Un film qui imprime durablement le cerveau à ce point, c'est rare. Du début à la fin grandit le sentiment d'assister à quelque chose d'aussi unique qu'exceptionnel, d'un film enragé qui ne se laisse enfermer dans aucune case et ébranle beaucoup de limites et notamment celles du spectateur.
Un film d'un mystère et d'une profondeur vertigineuse tant dans son (ses) propos que dans sa forme.
Un film remuant tant il soulève des questionnements divers et souvent complexes et tant il s'épanouit dans une ambiguïté maitrisée.
On pense alors à d'autres expériences traumatiques similaires au cinéma, Salo de Pasolini, Orange Mécanique de Kubrick, Irréversible de Gaspar Noé, Massacre à la tronçonneuse de Tobe Hooper sans jamais y voir ni d'influence notable ni de points réels de comparaison tant Martyrs semble être une oeuvre aussi inédite qu'unique.
Plus qu'un simple film, Martyrs est une expérience.
Mais une expérience qui se mérite : le film est extrême, radical et insoutenable, vous êtes prévenus.
Un mot sur Morjana Alaoui et Mylène Jampanoi, les deux comédiennes du film tout simplement hallucinantes