Tous les ingrédients sont présents pour que l'amateur d'animes façon studios Ghibli savoure l'instant présent. Des personnages bien caractérisés avec des héros pas encore sortis de l'enfance, des paysages bucoliques aux arbres gigantesques et à la végétation luxuriante, un rythme trépidant alternant courses-poursuites, suspense et moments plus tendres, des animaux complices quasi doués de parole, des créatures étranges semblant tirées de l'imagination d'anciens auteurs de SF ou inspirées de contes traditionnels, de la magie et de la fantaisie soutenues par un brin d'humour, une partition symphonique enjouée, à la fois classique et moderne...
C'est d'ailleurs presque un melting-pot des réalisations les plus emblématiques de Miyazaki : ça commence comme dans Mon voisin Totoro (si l'on excepte la scène d'introduction, haletante et très réussie) avec une jeune fille s'ennuyant à la campagne et découvrant les trésors que recèlent une mystérieuse forêt ; ça se poursuit comme dans Kiki la petite sorcière (un balai magique, un chat noir facétieux, des pouvoirs qu'on ne maîtrise pas et un garçon taquin qu'elle finira par aimer) puis comme dans le Château dans le ciel (un secret recelant un pouvoir fantastique, une académie de magie flottant dans les nuages) ou le Voyage de Chihiro (l'héroïne est contrainte de rester dans l'autre monde car ses amis ont été métamorphosés, les responsables s'avèrent nettement plus maléfiques que prévu, elle devra puiser en elle de quoi franchir le cap de l'enfance) en faisan tun clin d'oeil même à Princesse Mononoké (Mary se déplaçant à dos d'élan). Des références incontournables, qui se comprennent lorsque l'on constate qui a travaillé sur le film (Yonebayashi a été responsable d'animation aux studios Ghibli, Kazuo Oga est le créateur des forêts de Totoro et Mononoké et le compositeur avait déjà écrit la musique de Souvenirs de Marnie)
Mais toutes ces allusions par poignées ou ce sentiment permanent de "déjà-vu" finissent par lasser : certes c'est beau, plutôt bien animé et réalisé avec savoir-faire mais, s'il n'y a pas vraiment de temps mort, on finit par s'ennuyer un peu devant le manque de prise de risques narratif ou, simplement, de nouveauté. Le destin de l'héroïne est balisé, tellement qu'on connaît bien à l'avance les tenants et aboutissants du script et qu'on se doute des différentes étapes par lesquelles elle passera. Une petite surprise surviendra toutefois avec l'apparition d'un dernier allié, qui permettra de fixer quelques explications manquantes en donnant un sens à la première séquence.
Cela dit, ce serait dommage de faire la fine bouche. Le jeune public, comme les spectateurs moins cinéphiles ne devraient pas faire la grimace devant ce spectacle de bon ton, haut en couleurs, alliant la rêverie et le merveilleux, axé sur le caractère d'une jeune fille sur laquelle repose la sauvegarde de nombreux êtres chers. Récit fantastique, conte merveilleux, quête initiatique adaptée de l'oeuvre de Mary Stewart, Mary et la fleur de sorcière fait incontestablement passer un bon moment enter les frondaisons luxuriantes et les nuages recelant tant de mystères et le spectateur a la possibilité de faire bien plus d'aller-retours dans l'autre monde que dans Peter Pan.