Sous-titré "15 faits précis", le film de Godard annonce qu'il n'est pas une histoire structurée et chronologique, bien que la liaison entre Paul et Madeleine ait un début et une fin.
Le film est une agglomération de scènes dûment numérotées qui proposent le visage de la jeunesse française -masculine et féminine- des années 60, jeunesse attachée à Karl Marx et à Coca Cola. Bien sûr, le style délié de Godard nous oblige à une attention soutenue, avec ses incrustes, ses citations et ce bruit de rue qui, toujours, couvre les dialogues. Si bien qu'une partie du propos de Godard, parfois incertain sinon ésotérique, nous échappe par moments. Peut-être est-ce une façon de dire le peu d'intérêt que lui inspirent ses propres dialogues.
"Masculin-féminin" est un témoignage sociologique étonnant et exhaustif sur une jeunesse dont Godard expose la conduite face à la politique, à l'amour et à la sexualité, à la vie active...L'incompréhension qui caractérise la relation conflictuelle entre Jean-Pierre Léaud et Chantal Goya stigmatise un contraste entre garçons et filles, une disparité aux accents misogynes.
Paul est un sentimental cultivé, un gauchiste attaché aux valeurs humaines et capable de s'engager. Tout l'oppose à Madeleine, égocentrique ignorante et starlette du hit-parade dont le succès est le seul souci. La jeune femmes et ses amies sont incapables d'aimer et de réfléchir sur leur époque.
"Masculin-féminin", malgré sa complexité et son caractère élitiste, reste un film attachant et original.