Un drame historique visuellement et techniquement réussis, permettant au metteur en scène de délivrer son message humaniste par le divertissement. Révélant les faux semblants du pouvoir, son intrigue est située sous protectorat chinois, durant la dynastie Joseon de 1620. Suivre cette histoire sur le souverain Gwanghae-gun, personnage réel, qui tenta d'améliorer sa politique par une plus grande ouverture, permet au cinéma coréen, de changer de registre, mettant de côté les tueries sanglantes de thrillers pour une oeuvre poétique et romanesque.
Le souverain de Corée, Gwanghae-gun, tiraillé de toute part, loyal à l'empereur de la dynastie Ming, devra gérer les complications liées à ses voisins Mandchous et surtout les luttes intestines et manipulations de ses conseillers, tout à leur propre profit, au détriment du peuple et ne supportant “guère” les refus du Roi. Gwanghae-gun évitera les ennuis en délivrant stoïquement la phrase : “faites comme vous voulez” ! lors de leurs séances “parlementaires”.... révélant ici, le simulacre de pouvoir des souverains..
Mais Gwanghae-gun, isolé dans son palais, craignant pour sa vie, demandera à son conseiller de lui trouver un “double”. Rapidement victime de traîtrise, le roi est déplacé. Ha-seon, comédien de rues, parfait sosie du roi, rentrera "en scène" et sera dirigé par le secrétaire à la défense, Heo Gyun (Ryoo Seung-Ryong), qui aura la dure tâche de lui enseigner "les bonnes manières". Les rencontres entre le secrétaire du roi et Ha-seon réservent quelques bons moments de colères contenues du secrétaire face à la détermination de Ha-seon... à revoir la politique de son pays.
Chaque plan de ce genre huis-clos nous plonge dans une immense pièce de théâtre où tout les décors, costumes et rencontres, participent à ce jeu de dupes. De situations fantasques où tout est “cérémonial”... Tous s'agenouillent, où crient à l'unison pour avoir la bénédiction de leur souverain, servis par des dialogues souvent drôles et percutants teintées de politesse fourbe. Une belle scène d'ouverture pour la préparation du roi retranscrit à merveille l'art et la manière de la présentation et le poids des convenances.
Oeuvre de fiction, les décisions importantes (pour certaines véridiques), seront mises en oeuvre, ici, par la seule bienveillance de Ha-seon, qui n'en oublies pas ses origines. Une comédie avec en filigrane une romance truquée, quelques alliés improbables et des moments d'émotions. On oscille entre l'humour des situations de "prise de poste" et le drame, en seconde partie, où le bouffon, quant à lui, sera le héros de son propre château de cartes et devra faire face aux situations irréversibles qu'il aura enclenchées, tout à son rôle.
L'espace, ou au contraire les plans serrés, tout est parfait et le rythme ne fait pas défaut pour un film qui n'a que peu d'action. La musique de Mwog (j'ai rencontré le diable) et de Kim Jun-seong est bien choisie et l'esthétisme réussi. Complété de couleurs vives et d'une lumière alternant le sombre et le lumineux, cette farce douloureuse est un tableau aux multiples détails et aux multiples marionnettes.
Choo Chang-min et Hwang Jo Yun (scénariste de old boy) filment les acteurs au plus près jouant sur les expressions, mouvements et regards et sur la performance de Lee Byung-hun, qui incarne les deux rôles encore une fois, tout en sobriété et finesse... de ce roi fier... au bouffon rieur. Un film léger qui n'en oublie pas un certain message d'ouverture. A voir.