Mating
Mating

Documentaire de Lina Mannheimer (2019)

Amour et solitude à l’ère du numérique

Un homme et une femme se rencontrent. Elle est amoureuse, lui non. Ils se séparent et deviennent amis. L’homme regrette, la femme passe à autre chose.


De cette histoire universelle et déclinable à l’infini, Lina Mannheimer capte un aspect profondément générationnel : puisqu’il s’agit d’une relation à distance, Naomi et Edvin communiquent par Skype en attendant de se retrouver le temps d’un week-end. Le spectateur partage donc leur intimité sans passer par le filtre de la réalisatrice, observe le duo par leurs webcams interposées et découvre les petits vlogs qu’ils filment lorsqu’ils se voient I.R.L. Cet ancrage dans une époque se retrouve également dans la forme même du documentaire, qui prend plaisir à animer les discussions par messages pour les transformer en de petites pastilles humoristiques accrocheuses et dynamiques, à l’image de ce qu’on peut trouver sur Youtube.


Mating joue avant tout la carte de la sincérité : les protagonistes se confient sans tabou et prennent plaisir à se mettre en scène, conscients de construire à la fois une relation et un projet autour de cette relation. Le film est d’une énorme richesse, brassant une multiplicité de thèmes intégrés à leur quotidien : il est évidemment question de deuil amoureux et d’amitié homme-femme, mais il y a également un sous-texte amer sur les applications de rencontre, qui poussent les individus à se conformer à des stéréotypes réducteurs. Mais c’est avant tout la cruauté qui définit cette histoire : cruauté d’une époque où se confondent réel et virtuel, cruauté d’un amour non-réciproque, accentuée par la désinvolture de Naomi et l’acharnement d’Edvin.


À cela s’ajoute la position ambiguë de la réalisatrice, que l’on pourrait soupçonner de sadisme ; dans quelle mesure pousse-t-elle ses personnages à se rabibocher ? Car derrière cette amitié fusionnelle où règne la délicieuse confusion entre affection et amour se cache une profonde solitude, exacerbée par le départ d’Edvin pour Singapour. Là est la force de Mating, miroir intime et générationnel profondément douloureux pour celles et ceux qui ont déjà aimé.


Louer le film en VOD

Site d'origine : Ciné-vrai

Contrastes
7
Écrit par

Créée

le 4 janv. 2023

Critique lue 19 fois

Contrastes

Écrit par

Critique lue 19 fois

D'autres avis sur Mating

Mating
Outbuster
8

Documentation voyeuriste

Coup de cœur de la programmation Outbusterienne. Mating, c'est un documentaire sincère et intrusif dans la vie de deux jeunes suédois d'une vingtaine d'années qui discutent de sexualité et d'amour...

le 13 sept. 2023

Mating
Contrastes
7

Amour et solitude à l’ère du numérique

Un homme et une femme se rencontrent. Elle est amoureuse, lui non. Ils se séparent et deviennent amis. L’homme regrette, la femme passe à autre chose.De cette histoire universelle et déclinable à...

le 4 janv. 2023

Du même critique

Strange Way of Life
Contrastes
3

Soudain le vide

Il y a quelques années, Saint Laurent se payait les marches du Festival de Cannes en co-produisant Lux Æterna de Gaspar Noé, coquille vide qui permettait néanmoins à la marque de s’offrir un joli...

le 17 août 2023

24 j'aime

Unplanned
Contrastes
1

Propagande pure et dure

Même en tant que rédacteur amateur d’un blog à très faible audience, décider de consacrer un article à Unplanned est loin d’être anodin : dénoncé depuis plus de deux ans comme un nanard de propagande...

le 16 août 2021

14 j'aime

2

Knit's Island - L'île sans fin
Contrastes
8

L’ère de l’imaginaire

Les gamers le savent, un serveur peut fermer à tout instant et les joueurs se déconnecter à jamais du jour au lendemain. Les civilisations laissent des traces, les familles abandonnent des photos. À...

le 27 avr. 2023

11 j'aime