Simple mais émouvant
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Matriochkas est un petit court métrage étonnant. Plusieurs problématiques se bousculent , toutes traités sans lourdeur et sans moralisme : la grossesse non désirée, le choix, le regard des autres, l'adolescence, la contraception, l'avortement en pleine campagne. Les dialogues évoquent tous ces problèmes l'air de rien, sans discours outrancier ou questionnement intempestif.
Anna est une jeune fille adolescente, peut-être 14 ou 15 ans.(l'actrice est bien choisie et fait son âge, entre juvénilité et découverte de son corps, on n'essaie pas de nous tromper). C'est une jeune fille espiègle, avec de la confiance en elle et du caractère, pas seulement un joli minois. Elle taquine son frère qu'elle aime beaucoup, même s'il est dérouté et sûrement admiratif devant son audace. Elle remet les imbéciles à leur place comme l'indique le titre de cette critique . Fière d'elle, elle assume sa s'assume et s'amuse et ne recherche pas forcément l'amour, affichant une indépendance marquante et précoce.Elle tombe enceinte du beau gars de la classe, poussée par un désir sexuel naissant et irrépressible. Il ne semble pas y avoir d'amour. Elle suit ainsi le schéma de sa jeune mère des années plutôt, cette mère aussi indépendante et libre qu'elle, qui change d'amants tous les mois. Elle en a un en ce moment, et il va tenir une place importante, celle d'un soutien indéfectible. Toutefois, la mère va se montrer abusive en imposant à la jeune fille de garder l'enfant, sans lui demander son avis ou s'enquérir de son bien-être. Elle ne laisse pas sa fille seule au rendez-vous chez le gynéco(ce qui n'est pas normal), ne la laisse pas s'exprimer et se montre agressive. Le film trouve sa subtilité ici ; c'est la femme libre et indépendante qui étouffe sa fille au lieu de l'émanciper. La mère veut exprimer sa fierté d'avoir élevé des enfants seule,dans la précarité, sans l'aide de personne . Ainsi, elle veut voir sa fille prendre le même chemin qu'elle et révéler une même force de caractère. Toutefois, le courage c'est aussi choisir de ne pas garder l'enfant pour peut-être suivre une autre voie; poursuivre ses études, une vie sans attache et sans enfant, une vie d'artiste ou de vagabonde sans responsabilité lourde ou sans travail permanent, une envie de voyager , et bien d'autres. Le compagnon précaire de la mère, malheureusement largué, le comprendra bien et aidera Anna à prendre la décision qu'elle souhaite. En faisant de l'homme celui qui respecte son choix et la fait sortir de l'emprise de sa mère, le film ne sombre pas dans un portrait féministe caricatural et outrancier ou le mâle serait la figure patriarcale abjecte. Bien au contraire, il place l'homme en tant que figure paternelle bienveillante qui prend soin de sa fille et lui témoigne du respect.
Le film prend en compte toutes les difficultés inhérentes liées à l'avortement comme l'accès parfois compliqué à la campagne ou encore le délai imposé aux jeunes filles sûres de leur choix( disparu en 2016 en France) qui les plonge dans le désarroi ou la colère à cause de l'autre délai qui arrive à grand pas, celui de la fin d'une possibilité de l'IVG, au détour de dialogues écrits intelligemment , sans réflexions intellectuelles superflues ou discours militant.
Et pourtant , le film est militant : pas seulement pour l'avortement, mais surtout pour le choix. Il ne tranche pas et ne juge personne. Il met autant en avant le courage de la femme qui décide de garder ses enfants, sans en faire une femme brimée comme je l'ai dit, que la jeune fille qui décide d'avorter sans en faire une engagée aux opinions bien affirmées. Ce sont de simples femmes qui décident de faire des choix importants. Le titre du film est clair : Matriochkas, donc l'histoire de deux femmes courageuses et dignes aux décisions différentes.
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Créée
le 11 juin 2021
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