Le site est de retour en ligne. Cependant, nous effectuons encore des tests et il est possible que le site soit instable durant les prochaines heures. 🙏

Matrix Resurrections est une initiative assez paradoxale, mais terriblement libératrice. D’un coté, il permet à Lana Wachowski d’ouvrir une nouvelle brèche cinématographie pour parler de son rapport au cinéma et à la trilogie qu’elle a créée. Ce nouvel opus est bizarrement autant une suite logique à la trilogie susnommée qu’à sa filmographie entière, de Bound à Sense8.


Une œuvre qui fait le pont entre plusieurs thématiques comme celle du libre arbitre, du lien intemporel ou celle de la transidentité. De l’autre, le film est un blockbuster vif, drôle, rempli d’idées visuelles et qui contient dans ses veines un amour infini pour ses personnages : un spectacle onirique, graphique, où l’action n’est jamais mise de coté. Qu’on se le dise, le sujet central est bien là : l’amour. L’amour est un tout, un talisman qui brille et qui permet à chacun et chacune de se libérer, de se comprendre voire de s’écrire. Nous y voyons l’amour d’une cinéaste pour ses personnages, puis l’amour entre les personnages qui fait se réunir les mondes. Certes, le film reprend de nombreuses figures emblématiques de la mythologie Matrix : les pilules rouges et bleues, l’illusion, la croyance, la matrice et la réalité, les combats, l’aliénation, l’humain et la machine sauf qu’à l’image de Morpheus et l’agent Smith, le reflet a quelque peu changé.


A l’image de toute la première séquence, qui reprend presque trait pour trait l’ouverture de Matrix, Lana Wachowski joue avec nos attentes en se demandant : qu’est ce qu’une suite surtout lorsqu’elle invoque une forte nostalgie ? En ce sens, ce qui marque premièrement le plus dans ce nouvel opus, c’est à quel point il est conscient de lui-même notamment dans sa première partie : un film qui s’autoréférence à outrance, sans que cela soit hors propos ni fallacieux. C’est même le contraire. Il ne fait que parler de l’aura qu’il a eu auprès d’une longue et large communauté, avec la toxicité que cela a pu amener. De manière sarcastique et ironique, le film s’interroge sur sa propre existence et les causes de sa naissance mais ne le fait jamais de manière gratuite. La réalisatrice arrive parfaitement à trouver l’équilibre entre son propos dénonciateur, l’avancée de son récit, et l’écriture nouvelle de ses personnages (Buggs).


Avec Matrix Resurrections, nous sommes plongés dans une nouvelle matrice, où Thomas Anderson a crée le jeu vidéo « Matrix » qui est devenu un carton planétaire et pendant ce temps là, « Trinity » a une vie de famille paisible, sans que les deux ne se connaissent de près ou de loin. Là où des films comme Spider-man : No Way Home se fourvoient dans une nostalgie factice, consensuelle et qui se servent des souvenirs comme de simples figurines qu’on sort une fois tous les 5 ans des cartons poussiéreux afin de faire rêver une fanbase déjà conquise à sa cause, Lana Wachowski prend alors le pari inverse. Pari ingrat mais qui à l’honnêteté de dévoiler une cinéaste prenant un recul nécessaire par rapport à sa création : avec cette volonté perpétuelle de la construction/déconstruction (la notion de l’Elu) comme l’avait fait dernièrement Ridley Scott avec Alien Covenant ou Rian Johnson avec Star Wars VIII : Les Derniers Jedi.


Cette velléité est celle de se questionner sur sa raison d’être et de pointer du doigt une communauté qui a enfermé sa trilogie dans une sphère qui la dépasse. Derrière ses quelques lignes, on pourrait rapidement penser que Matrix Resurrections ne soit qu’un simple film à thèse, peu subtil, et qui comme le faisait déjà Speed Racer, se veut être un pamphlet contre la société de consommation. Mais tout comme ce dernier, le cinéma est visible à chaque plan. C’est un plaisir de chaque minute. Après tout ce propos sur le monde du cinéma, sur la notion de suite et l’apogée hollywoodienne qui s’abat sur ce non renouvellement continuel et consumériste, Matrix Resurrections un « vrai film de cinéma ». L’expression est malvenue et inutile car il est difficile de différencier un vrai film avec un faux film, mais la réalisatrice s’efface petit à petit de l’écran et du texte, pour regarder ses personnages se mouvoir dans un nouvel environnement et nous faire ressentir un sentiment que les blockbusters actuels arrivent peu à toucher : l’émotion. Un simple rendez vous entre Néo et Trinity autour d’un café devient un moment de grâce.


L’aspect blockbuster « reprend ses droits » dans une deuxième partie à la structure plus attendue, avec cette conquête et cette recherche de l’être aimé mais qui arrive tout de même à nous faire retrouver la gloire d’antan visuelle, épique et inventive du cinéma d’action que peut fabriquer Lana Wachowski. Matrix Resurrections est un film hybride, une suite qui ne ravira pas tous les fans qui se sentiront visés ou insultés par une cinéaste qui ne souhaite qu’une seule chose : faire que ses personnages n’appartiennent à personne et soient libres de leurs propres destinées.


Article original sur LeMagduciné

Velvetman
9
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à sa liste Velvetman est encore là et regarde (parfois) quelques films en 2022

Créée

le 31 janv. 2022

Critique lue 433 fois

23 j'aime

Velvetman

Écrit par

Critique lue 433 fois

23

D'autres avis sur Matrix Resurrections

Matrix Resurrections
lhomme-grenouille
4

Cette guerre qui n’en finit pas (…et que la Matrice gagne à chaque fois)

Une fois de plus il sera question de cette fameuse guerre... Cette guerre qui boucle sans cesse à chaque nouveau film. Cette guerre qui se rejoue en permanence et qui semble sans fin. Cette guerre...

le 23 déc. 2021

135 j'aime

50

Matrix Resurrections
Behind_the_Mask
8

Je me souviens de nous

J'ai fait souvent ce rêve étrange et pénétrant D'une matrice bien connue, rebootée et qui défie même Mes attentes, et qui ne serait ni tout à fait la même Ni tout à fait une autre, pour faire taire...

le 22 déc. 2021

93 j'aime

23

Matrix Resurrections
thetchaff
6

Méta rixe

Cette critique s'adresse à ceux qui ont vu le film, elle est tellement remplie de spoilers que même Neo ne pourrait pas les esquiver.On nous prévenait : le prochain Matrix ne devrait pas être pris...

le 27 déc. 2021

75 j'aime

3

Du même critique

The Neon Demon
Velvetman
8

Cannibal beauty

Un film. Deux notions. La beauté et la mort. Avec Nicolas Winding Refn et The Neon Demon, la consonance cinématographique est révélatrice d’une emphase parfaite entre un auteur et son art. Qui de...

le 23 mai 2016

276 j'aime

13

Premier Contact
Velvetman
8

Le lexique du temps

Les nouveaux visages du cinéma Hollywoodien se mettent subitement à la science-fiction. Cela devient-il un passage obligé ou est-ce un environnement propice à la création, au développement des...

le 10 déc. 2016

260 j'aime

19

Star Wars - Le Réveil de la Force
Velvetman
5

La nostalgie des étoiles

Le marasme est là, le nouveau Star Wars vient de prendre place dans nos salles obscures, tel un Destroyer qui viendrait affaiblir l’éclat d’une planète. Les sabres, les X Wing, les pouvoirs, la...

le 20 déc. 2015

208 j'aime

21