Il y a de ces films, à l'aspect visuel, à l'humour, et à la provenance douteuse, dont on récolte que très peu d'information avant la sortie de la bande annonce, voire avant la sortie salle du film. C'est notamment de cas de films "direct to gulli" à l'image de la saga Oups j'ai raté l'arche, ou du récent Hopper et le hamster des ténèbres qui était le film de la séance jeunesse au Festival international du film fantastique de Gerardmer 2022. En parlant de ces deux films, le réalisateur de Oups j'ai raté l'arche revient avec une adaptation d'un conte jeunesse de Terry Pratchett intitulé Le Fabuleux Maurice et ses rongeurs savants, appelé Maurice le chat fabuleux, sélectionné en projection jeunesse à l'édition 2023 du festival de Gerardmer. Si l'histoire de ce film ne s'était limité qu'à cela, le film en lui même ne m'aurait pas intéressé outre mesure. Mais malgré tout, on pouvait noter que le film est scénarisé par Terry Rossio, l'un des scénaristes les plus influents dans le cinéma américain, notamment à l'origine de Shrek. Qu'on aime passionnément ou non la saga Shrek ou bien les productions DreamWorks, on ne peut pas nier une réelle attention vis-à-vis du conte de fée, récemment confirmé et approuvé par le récent carton qu'est Chat Potté 2: La dernière quête, qui accorde une attention toute particulière au respect des contes et aux textes oraux via une reprise humoristique, voire une parodie satyrique amenant à une relecture moderne des contes. Du coup savoir que Maurice le chat fabuleux est sans doute un héritier de l'amour et de la maitrise du conte de Shrek, cela a de quoi capter sérieusement l'attention, malgré que ce soit une co-production allemande. Enfin vient le moment où le film va jusqu'à gagner des prix en festival comme le prix du public au festival internationale de la science fiction Utopiale de Nante (dont la programmation est assurée par le fondateur et le délégué générale de l'Etrange Festival) devant des films comme The Witch : Part 2. The Other One (suite de The Witch : Part 1. The Subversion) de Park Hoon-jeong (scénariste de J'ai rencontré le Diable de Kim Jee-woon), ou encore le dernier Alberto Vasquez, Unicorn Wars, qui a fait grand bruit au festival d'Annecy ou à l'Etrange Festival de Paris... On sent venir l'embrouille, et malgré les bandes annonces peu flatteuses et à l'affiche assez peu fine, je me suis laissé embarqué dans l'aventure... mais à quel prix ?
Après une introduction extrêmement élogieux comme celle que j'ai pu faire (sans doute l'une des plus élogieuse que vous pourrez lire parlant de ce film), il est évident de devoir débunker la chose d'entré pour mieux laisser place aux débats: Oui le film n'est pas fin, oui il y a des vannes tendancieuses, on a notamment des souris qui pissent en gros plan sur des assiettes, oui le film n'est pas un chef d’œuvre absolue, et il est évident que si vous ne voulez pas voir le film avec un regard ouvert et neutre, le film va vous paraitre lambda, fade, voire même médiocre. Maintenant, si le film vous intéresse tout de même et/ou que la critique vous intrigue toujours, je peux vous donner des arguments pour aller soutenir un film qui, au final, est très intéressant. Déjà dans sa structure et son fonctionnement, le film ose adopter une forme de mise en abyme et de conte imbriqué qui, pour un public jeune, est plutôt technique et osé. Surement que je ne fais que décrire l’œuvre originale de Terry Pratchett (que je n'ai pas vu et que je connaissais pas avant de voir le film), mais le film, de par son origine de conte, va exploiter son statu de conteur pour raconter l'histoire du Fabuleux Maurice et ses rongeurs savants, mais aussi va faire appel à différents contes dans l'histoire de Maurice, que ce soit le joueur de flute d'Hamelin ou même la légende du roi des rats, ainsi que l'introduction d'un conte anthropomorphe pour chapitrer le conte de Maurice. Que cela vienne du conte ou non, la chose est que le film et son récit sont extrêmement bien rythmé, et que tout vient intelligemment s'emboiter dans l'humour et le ton même du film. Comme je le disais en introduction, le scénario du film est le fruit d'un travail d'adaptation de quelqu'un ayant déjà eu affaire à la figure du conte et de l'humour moderne avec Shrek. On va avoir une narratrice racontant deux histoires, que sont celle de Maurice et celle d'un lièvre façon La Fontaine (qui se veut comme une interlude entre chaque chapitres de l'aventure de Maurice), qui va être incorporé à l'histoire comme en tant que personnage à part entière, et qui va être questionné sur son statu de narratrice, à l'occasion de son passage d'une vue omniscient sur son récit à un statu de personnage au regard plus interne. On va avoir beaucoup de décalage et de second degré très fin sur le positionnement de Malicia, déjà sur le fait qu'elle soit un personnage lisant une histoire dans sa temporalité et dans son monde propre, amenant notamment des fois où elle est coupée par son père qui préviens que la soupe va refroidir, mais aussi par son statu de personnage apportant et ayant appris de la connaissance. Parce qu'elle lit beaucoup de livres et qu'elle a des connaissances, "tout comme le jeune public" (on y reviendra plus tard), elle connait les tropes du film pour enfant, et elle connait les clichés des contes pour enfants. Inconsciemment, elle connait la suite de l'histoire, influe sur les autres pour que eux aussi soit au courant de la suite de l'histoire, et cherche à aider à sa manière en indiquant ce qui suit (ou non) le cliché des histoires d'aventures. Dis comme ça, on dirait un personnage insupportable à qui on aimerait foutre des claques parce qu'il brise toute la suspension d'incrédulité du récit. Cependant, le tout n'est pas tant fait dans un manichéisme qui établis une caractéristique méta aussi grande et risqué à un personnage sans raison. Étant placé dans un monde où les personnages n'ont pas toutes ces connaissances et/ou souhaite se préserver leurs côtés candide et innocent, ce personnage sera amené à être pris de haut et être moqué car étant en parfait décalage avec l'action. Dans le même registre, cela m'a rappelé certains épisodes de la série Le Monde Incroyable de Gumball, tant l'humour méta-textuel est singulier et maitrisé. A savoir tout à l'avance et à ne pas profiter de l'instant présent, Malicia est un personnage qui va être questionné dans son obsession à vouloir tout calculer au préalable, causant des dégâts moraux sur son passage lorsque celui-ci sera confronté à des personnages dans une misère tel qu'il n'y a que la fantaisie et l'espièglerie des contes pour leur donner espoir. S'il est glorifiant de tout connaitre et d'apprendre des choses, il est montré comme un défaut de tout savoir et de ne pas assez prendre son indépendance vis-à-vis des règles et clichés du conte. A l'image de Malicia qui a déjà tout vu, le spectateur adulte est invité à oublier ce qu'il sait déjà pour le plaisir même de tout redécouvrir, et même se surprendre à découvrir de nouvelles choses en revoyant certains clichés réactualisés. On retrouve la notion de démystification des légendes que l'on avait dans Shrek, mais celle-ci sera employé dans un but beaucoup moins humoristique qu'à la normale, tendant presque dans l'horrifique, lorsqu'il va s'agir de portraiturer un joueur de flute dont on lui a accentué certains traits questionnable pour en faire un être malsain abusant de ses pouvoirs. Car oui, un point qui va vous surprendre, c'est que le film traine étonnamment avec des thématiques assez sombres et matures qui vont, par moment, tendre vers des choses presque horrifiques, lorsqu'on va mettre en scène des combats de chien underground, ou lorsqu'on va exposer l'histoire de rats dépossédés et torturé physiquement lors d'un phénomène de roi-de-rats. C'est un film vraiment surprenant et riche, et le film tient extrêmement bien la route.
Le film fait beaucoup pensé à Chat Potté 2 : La dernière quête (dans sa manière de remettre en avant le conte de fée et d'utiliser le détournement du conte pour appuyer un propos sur la nécessité de revaloriser le conte, à une période qui pousse à négliger ce genre de récit) et avait de quoi être un bon équivalent. Malheureusement, malgré les meilleurs intentions du monde, on ne peut pas cacher le fait que le film est moche. La réalisation n'est pas tant moche dans ses moyens technique qui, par moment, arrivent à créer de très belles scènes (notamment dans son final ou lors des scènes nocturnes avec le narrateur), mais plus dans son exécution. Certaines textures de peau humaine du visage ont l'air de fondre, certains jeux de lumières laissent entrevoir des défauts de modélisations, et certains design ne joue pas le jeu et ont l'air d'être sorti de la tête d'un MJ pas inspiré, comme une souris savante qui a le design d'un simili Moïse. Cela est surement dû au fait que le réalisateur du film, Toby Genkel, est surtout un réalisateur de films à la qualité peu regardante, à la limite du yesman de studio sans trop de talent, à l'image de son film précédent, Yakari la grande aventure, qui a réussit l'exploit de copier à la lettre le scénario de deux épisodes, de 15 minutes chacun, condensés en un résultat de 1h20 consternant de nullité. Mais plus que la réalisation qui pèche, c'est carrément tout le projet qui semble souffrir de sa nature de film d'animation allemand pour enfant, car même le doublage français du film est raté. Je ne parle pas tant de la qualité du jeu d'acteur qui est globalement plutôt bon malgré certaines rare sortie, mais de l'action de doubler avec une voix sur un personnage au bon moment. Il y a des moments surréalistes où des personnages parlent (souvent en arrière plan, "heureusement") et où le personnage n'est pas doublé. C'est très rare de voir cela, mais fort est de constaté que cela arrive encore aujourd'hui en dehors compilation de pire doublage d’œuvres assez vieilles, qui étaient doublé à la chaine, soit par des personnes mal intentionnés qui n'ont pas beaucoup pour l’œuvre originale. On sent que, malgré les bonnes volontés, soit par un manque de budget ou un manque de rigueur, on n'arrive pas à dépasser le cap du film devant occuper des enfants, sans autre vocation (ce qui n'est objectivement pas le cas ici au vu de son propos et de son exécution qui, quoi que sommaire par moment, a vocation à pousser à la réflexion sur notre rapport au conte). Cela amène une introduction où l'on doit faire chanter les personnages comme un simili Disney alors que ce n'est pas l'ADN même du film. Si l'on devait catégoriser le film, celui-ci ressemble plus à un film DreamWorks vis-à-vis de son rapport au conte et son côté sulfureux et spontané, qu'à un film consensuel à la Disney qui va plus tendance à cultiver une forme de retenu et de mise en scène très millimétré. Par moment, on sent que le film se cherche et va aller puiser chez Disney et DreamWorks, en oubliant parfois d'être harmonieux et cohérent. Il n'empêche que le film transpire d'un vrai amour du conte, et cherche avant tout à créer un lien avec le public, à l'image de ses nombreux apartés cassant le 4e mur. Le film s'adresse avant tout à l'enfant qui sommeil au fond de nous et il est évident que le film ne saura le meilleur film de l'année, ni même du mois. Malgré tout, est ce que vous comptiez réellement voir un chef d’œuvre en vous renseignant sur ce film et en allant le voir ? Ce n'est pas tant un défaut d'être imparfait, c'est la morale même du film, qui met en scène des personnages perdues dans leurs vies et dans un monde beaucoup trop grand pour eux. Lors de la scène d'ouverture chanté, il y a un enfant qui ne croit pas en Maurice et ses amies, repérant très vite la supercherie, et critiquant l'absence du joueur de flute dans ce qui semble être une pale copie d'un Garfield mal aimable avec beaucoup trop de dents. A l'image de ce garçon, je vous invite à aller voir le film et à le soutenir car, à l'image du jeune garçon qui ne croyait pas en Maurice, il a appris à trouver quelque chose de bon. Plus généralement, si vous avez aimé Chat Potté 2 et que vous voulez prolonger l'expérience avec un film un peu plus modeste et boiteux, malgré que cela n'est pas un chef d’œuvre, Maurice le chat Fabuleux vous proposera au moins un très bon moment honnête et agréable.
14/20
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