Avec X, Ti West tentait de renouer avec le feeling craspec de Massacre à la Tronçonneuse. Tout en exaltant dans un même mouvement une certaine idée de l'industrie du cinéma des années soixante-dix et du sentiment de liberté qui l'irriguait.
Plutôt cool, comme expérience, à vrai dire. Alors quand le réalisateur promettait une exploration plus poussée de son univers, une telle initiative ne pouvait pas se refuser.
Sauf que Ti West, avec Pearl, s'éloignait déjà un peu, en apparence, de sa formule gagnante. En délaissant sa final girl pour mieux s'intéresser à son antagoniste et remonter à sa source. En délaissant un peu l'horreur, qui n'éclaboussera plus l'écran que de manière parcimonieuse. Mais le réalisateur y conservait sa volonté de parler de l'aube d'Hollywood, de l'industrie et des rêves de célébrité qu'elle nourrit. Les rêves fanés de la méchante de X se retrouvaient en bourgeon dans Pearl, qui se heurtait à l'emprise et la bigoterie de sa famille, dans un film épousant par instant les reliefs d'une comédie musicale pour le moins décalée en technicolor, transfigurant la ruralité crasse du premier opus.
Avec MaXXXine, Ti West pare une nouvelle fois sa désormais trilogie d'autres couleurs en 2024. Celles aux accents de film noir, référence au mythique Chinatown incluse. Ou encore celles du giallo et du thriller underground vagabondant du côté de Hollywood Boulevard, tout de néons de sexshops et de vidéoclubs éclairé.
Soit le souvenir d'un cinéma perdu et d'une décennie américaine tendance reaganienne, conservatrice et paranoïaque en pleine Satanic Panic.
Maxine, elle, évolue dans un milieu du porno sur le déclin, sans avoir pour autant abandonné ses rêves de gloire : elle épouse le visage d'une Pearl qui aurait réussi à percer. Ces deux femmes sont intimement liées, sont étonnamment semblables tant dans leur parcours, leurs carcans, que dans leurs aspirations. Mais tandis que Pearl aura vécu sans jamais avoir touché du doigt son rêve, l'horizon de Maxine semble enfin se dégager... Jusqu'à ce que le massacre vu dans X ne la rattrape.
Il est évident que MaXXXine, au sein de la trilogie formée, s'impose comme le film qui a le plus d'ampleur, tant dans les lieux visités que dans le casting convoqué, rempli à la fois de grands noms et de visages bien connus venus incarner des seconds tôles hauts en couleurs. C'est aussi celui qui fait converger la cohérence de l'ensemble, en en concentrant l'ensemble des rimes thématiques et des atmosphères cinématographiques illustrées. Celles de la réalité sordide de l'usine derrière l'image lumineuse. Celles du scandale et de la complaisance.
Maxine devient finalement l'incarnation de l'un des monstres auxquels l'industrie a donné naissance pour mieux s'en nourrir. Car Maxine n'est plus la victime des événements, comme le montre une scène d'agression bien retorse qui se retourne littéralement contre son auteur. Et si le personnage attire très facilement la sympathie, elle détonne dans le paysage dès lors qu'elle fait montre dans un même mouvement de son amoralité revendiquée.
Et l'on peut se demander, en vue d'un final idyllique, si l'illusion et la soif inextinguible de reconnaissance n'ont pas pris le dessus sur une réalité qui aurait tout de la farce sardonique arrosant le star system de vitriol.
Mais peu importe finalement l'option choisie par Ti West, tant MaXXXine s'impose comme la conclusion éclectique et parfaite de son propos sur l'envers du décor du monde du spectacle. Car comme le proclame l'affiche du film, pour une fois avec raison et sans mentir sur la marchandise, le rêve hollywoodien n'a jamais été aussi sanglant.
Behind_the_Mask, tapis rouge.