Après Hippocrate, encore un film sur la médecine de Thomas Lilti. Ce réalisateur, médecin lui-même est bien placé pour parler de ce qu'est ce métier si complexe, au cœur de l'humain.
C'est aussi encore un coup de maître de François Cluzet ! Il incarne avec brio Jean-Pierre Werner, un médecin quinqua exerçant son métier dans un coin paumé du fin fond de la Picardie.
On le suis dans ses consultations, au chevet des patients isolée, souvent des vieilles personnes, parfois les pieds dans la boue, traversant les cours des fermes, ou bien à son cabinet, à la salle d'attente bondée.
Seulement, pour corser le scénario, François Lillti a décidé d'inverser un peu la donne : c'est Jean-Pierre Werner qui va basculer de l'autre côté et devenir patient à son tour. Car il a une tumeur au cerveau.
Le cancérologue qui le soigne à l’hôpital, le Dr Norès, lui envoie une ancienne infirmière devenue médecin, Nathalie Delézia, afin de l'aider dans son travail, craignant qu'il ne se fatigue trop et que le traitement de chimio marche mal.
L’accueil de Werner pour Nathalie va être très froid, tant il refuse d'être assisté, habitué qu'il est à faire tout, tout seul. Il commence par la remettre en cause, se moquer d'elle, bref, il essaye de la décourager. Mais Nathalie est une cow-boy, elle en veut, elle s'accroche et le pire c'est qu'elle est bonne et qu'elle se fait accepter progressivement par les patients.
Progressivement, le regard de Werner change sur sa consœur. Il lui fait de plus en plus confiance, il aligne ses potions sur les siennes, il l’apprécie.
Lors d'un fête de village, au son de la country, il admire sa sociabilité, son regard tendre sur les gens. Son fils d'ailleurs ne s'y trompe pas; il a perçu ce regard différent de son père sur Nathalie, son père d'habitude si farouche, si têtu, si seul.
J'ai aimé l'authenticité de ce film qui est un kaléidoscope de personnages et de situations. C'est autant une histoire d'Amour, qu'une histoire de pays, d'un monde rural avec ses habitants, ses rites ses particularités. J'ai aimé les personnages secondaires (la mère de Werner, le vieux monsieur mourant, l'infirmière, le paysan, le jeune homme handicapé). Ils font vrai; ils sont touchants sans en faire des tonnes.
Et évidement, le clou du spectacle, c'est ce duo si attachant formé par François Cluzet et Marianne Denicourt, opposés mais fraternels.
J'ai apprécié ce regard différent sur la médecine, qui va à contre courant de la médecine actuelle qui tend à devenir de plus en plus liée aux enjeux commerciaux de al rentabilité et des lobbyings, détachée des affects, où on ne prend pas le temps d'écouter les individus, alors que Werner le dit à Nathalie : "90 % des diagnostics, ce sont les patients eux-mêmes qui le font, alors il faut savoir les écouter".
Ce film peut être vu en parallèle de La maladie de Sachs, l'excellent film de Michel Deville, avec Albert Dupontel, inspiré de l'ouvrage éponyme de Martin Winckler.