Christopher Nolan est aujourd’hui un réalisateur mondialement reconnu, ayant rencontré le succès avec, notamment, Le Prestige, la trilogie Batman, Inception ou, plus récemment, Interstellar. Ce cinéaste aujourd’hui emblématique est pourtant parti de rien, et c’est avec Memento, son second long-métrage, qu’il va réellement prendre du galon.


L’histoire s’intéresse à Leonard, enquêteur dans une compagnie d’assurance. Un jour, des hommes cagoulés entrent chez lui par effraction, violent et tuent sa femme. En attaquant l’un des agresseurs, Leonard se retrouve projeté contre une glace et perd connaissance. A son réveil, il se rend compte que sa mémoire à court terme ne fonctionne plus, et qu’il n’est plus capable de se rappeler de ce qu’il a fait dix minutes auparavant, mais qu’il peut se souvenir d’événements antérieurs au meurtre. Malgré ce handicap certain, Leonard part à la chasse des agresseurs de sa femme.


Nous connaissons aujourd’hui Christopher Nolan pour ses scénarios complexes et tortueux, mais toujours fascinants et admirables d’habileté. Pour les adeptes du réalisateur, nul doute que Memento est une véritable référence, tant par son étiquette de premier grand succès pour le réalisateur, mais aussi par sa construction et la gymnastique intellectuelle qu’il impose au spectateur. Aidé par son frère dans l’écriture du scénario, le jeune réalisateur obtient un budget de 4,5 millions de dollars pour tourner Memento. Il n’en fallait pas plus.


Je l’aurais bien jouée à l’envers, mais cela aurait été un peu trop prévisible non ? Au final, Leonard est-il victime ou maître de la situation ? Grâce à sa réalisation d’une extrême sobriété, mais soignée au possible, Nolan nous captive à travers ce thriller atypique et joue sa thématique à fond, comme il l’a toujours fait. Ainsi, le montage est mis à profit pour désorienter le spectateur, mais il ne faut pas trop d’efforts pour ne pas perdre le fil de l’intrigue. Construit comme un entonnoir, le film nous fait progresser vers un point de convergence. L’histoire est volontairement racontée à l’envers, à travers une succession de flash-backs qui se suivent les uns les autres, entrecoupés par une scène se déroulant dans le présent. A travers sa réalisation, Nolan parvient à nous faire partager le mal que subit Leonard.


Memento m’a fait le même effet qu’Inherent Vice récemment, car si les deux films n’ont quasiment rien à voir, ils ont en commun la manière dont ils sont réalisés et agencés, qui a pour but de faire transpirer la thématique du film et son contexte (dans le cas d’Inherent Vice, le rendu très fouillis, déjanté et imprévisible est un écho direct au mouvement psychédélique de la fin des années 60). L’ambition du film réside surtout dans la manière dont il appréhende le problème, et sa capacité à restituer une intrigue, tout en plongeant le spectateur en son sein. Memento est un film réellement prenant, extrêmement simple et sage d’apparence, qui captive par la réussite esthétique et technique qu’il incarne. En réalité, c’est difficile de savoir par où commencer, mais je peux dire qu’ici, il n’y a pas de place pour l’erreur.


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le 12 mai 2015

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